L’époque n’en est pas à un paradoxe près. Le débat actuel sur les retraites ne parle que de la durée de cotisation, mais pas du montant des pensions. On sait pourtant qu’il faudra cotiser plus pour percevoir moins. Il serait logique, pour ne pas dire responsable, que les Français soient encouragés à épargner pour leurs vieux jours dans des produits pérennes et rémunérateurs. Non.
Au lieu de cela, on va leur suggérer de sacrifie leurs plans d’épargne entreprise sur l’autel de la consommation. Mieux ! On les encourage à la spéculation. Reprenant à son compte le slogan qui a fait la fortune des réseaux de défiscalisation – « transformez l’argent de vos impôts en patrimoine » -, l’Etat propose aux redevables de l’ISF d’investir une partie de leur impôt dans le capital risque. Qu’ont-ils à y gagner ? Pas grand-chose, si l’on en croit la note* d’un organisme gouvernemental, le très sérieux Centre d’analyse stratégique. On y lit, en effet, que « le rendement ne justifie pas l’exposition au risque sur ce type de placement ». « L’usage d’incitations fiscales à l’entrée paraît dès lors ambigu, poursuit la note. Il tend à exposer les particuliers, qui constituent a priori les investisseurs les plus vulnérables, au risque de perte. » Quelle importance, n’est-ce pas, puisque c’est l’argent de l’ISF ? Perdu pour perdu… Plus sérieusement, que les vraies grandes fortunes investissent dans le capital risque, cela se comprend. Elles le feront d’ailleurs en s’entourant des conseils d’éminents spécialistes. Mais comment peut-on inciter à jouer, avec l’argent de leur impôt, des foyers qui ne doivent d’être à l’ISF qu’à la valorisation récente de leur patrimoine immobilier ?
Christian Micheaud