La collecte des fonds immobiliers grand public (SCPI, sociétés civiles immobilières et OPCI) s’est effondrée au 2e trimestre. Sur un an glissant, elle recule de 70%. Les OPCI et, c’est nouveau, les sociétés civiles, sont les plus affectés.
« Les épargnants doivent garder à l’esprit que les fonds immobiliers non cotés restent avant tout des produits de placement de long terme », tente de déminer Jean-Marc Coly, le président de l’ASPIM. L’association des gestionnaires d’actifs immobiliers et l’IEIF viennent de rendre publics les chiffres de la collecte du 2e trimestre 2023. Ils ne sont pas bons… La tendance baissière amorcée en début d’année se poursuit et s’amplifie. Les fonds immobiliers non cotés n’ont en effet recueilli qu’environ 1,3 Md€ de souscriptions nettes au 2T 2023.
Fonds immobiliers : une collecte trimestrielle en repli de plus de 70%
Un montant en repli de plus de 70%, comparé à celui du 2T 2022 (4,4 Md€). Et inférieur au plus mauvais score enregistré par les véhicules de la pierre-papier ces dernières années, celui du 2T 2020 (1,6 Md€). Sur l’ensemble du 1er semestre 2023 (4,1 Md€), la baisse ressort encore à plus de 50% par rapport à la même période en 2022 (8,2 Md€). « Dans le contexte économique actuel, les investisseurs font davantage preuve d’attentisme vis-à-vis des placements immobiliers », explique l’ASPIM dans son communiqué. Les fonds immobiliers ne sont d’ailleurs pas les seuls à connaître un désamour. Selon les dernières statistiques de SIX, les fonds d’investissements français -SICAV et FCP, essentiellement- ont aussi un repli le mois dernier, de l’ordre de 0,55%. Toutes les catégories de fonds -monétaire, actions, alternatif, matières premières- sont en recul. A l’exception, notable, des fonds obligataires, qui attirent toujours plus d’investisseurs…
Ajuster le prix des parts des fonds immobiliers
L’immobilier souffre, lui, d’un problème spécifique. Avec la hausse des taux d’intérêt, un phénomène « de réajustement à la baisse des prix de l’immobilier » est à l’œuvre, rappelle l’ASPIM. Ce qui n’est pas forcément une mauvaise nouvelle pour les investisseurs « de long terme ». Le temps lisse en effet les cycles baissiers. Et ce réajustement « devrait offrir de nouvelles opportunités d’investissement aux fonds immobiliers. Qui pourront acheter à des taux de rendement plus élevés », estime l’ASPIM. A condition, bien sûr, que ces fonds soient toujours alimentés par de nouvelles souscriptions. Pour éviter que la collecte se grippe durablement, l’association plaide pour plus de transparence. Elle invite notamment les gestionnaires de SCPI à « tenir compte des évolutions actuelles pour ajuster, si nécessaire, les prix des parts ».
Les valeurs liquidatives des OPCI et des sociétés civiles se sont déjà ajustées
Une incitation qui intervient au moment où régulateurs – l’AMF, en l’espèce – et investisseurs s’interrogent sur les méthodes de valorisation des actifs non cotés, dont font partie les actifs immobiliers. Et qui part sans doute du principe qu’un réajustement – à la baisse, donc-, des prix de souscription de certaines SCPI -les plus tendues en valeur d’expertise – pourrait mettre fin à « l’attentisme » actuel des investisseurs. Plus incités à investir une fois les baisses « nécessaires » actées… Cette théorie n’a toutefois pas fonctionné pour les OPCI et les sociétés civiles immobilières, dont les valeurs liquidatives se sont déjà ajustées. Ces deux catégories de fonds immobiliers sont en effet celles qui subissent le plus nettement le repli de la collecte.
Les OPCI désormais en phase de décollecte nette
Pour les OPCI, on est désormais clairement entré en phase de décollecte. Le 2T 2023 est en effet leur 3e trimestre consécutif de décollecte nette. Dont le niveau ne cesse de progresser. Il était de -135 M€ au 4T 2022. De -325 M€ au 1T 2023. Il atteint -652 M€ au 2e trimestre 2023… Pour l’ASPIM, ce phénomène s’expliquerait par « le recul des performances enregistrées depuis le début de l’année ». Fin mai, les OPCI affichaient de fait une performance négative de -2,9%, selon l’indice IEIF OPCI Grand Public. Mais la décollecte des OPCI s’explique aussi par un phénomène plus global de recul des unités de compte immobilières au sein des contrats d’assurance-vie. Dont pâtissent aussi, et c’est nouveau, les sociétés civiles immobilières.
Sociétés civiles immobilières : le recul de la collecte atteint 80%…
Ces dernières ont connu ces dernières années un engouement croissant. Tant du côté des souscripteurs que du côté des assureurs. Incitant d’ailleurs les gestionnaires d’actifs à lancer régulièrement de nouveaux véhicules. Leur part relative dans la collecte globale des fonds immobiliers est ainsi passée de 25%, en 2020, à plus de 30% en 2022. Cette part relative, si l’on tient compte de la décollecte OPCI, est retombée à moins de 20% ce deuxième trimestre. Leur collecte nette, d’environ 250 M€, est d’ailleurs de 80% inférieure à celle enregistrée au 2T 2022 (1,4 Md€) … Les SCPI, pour leur part, avec une collecte nette de 1,7 Md€ ce trimestre, sont en apparence les moins affectées par le recul des souscriptions nettes. Le repli, par rapport au 2T 2022, n’est « que » d’une trentaine de pourcents.
Collecte plus résiliente pour les SCPI, mais…
Mais ce repli plus modéré s’accompagne d’un autre phénomène qui commence à inquiéter les observateurs : une hausse significative des demandes de rachats. Et donc des parts de SCPI échangées sur le marché secondaire. « Les différents mécanismes de gestion de la liquidité permettent une gestion normale de ces demandes », estime l’ASPIM. Le marché secondaire a néanmoins atteint le milliard de parts échangées au 2e semestre 2023. 33% de plus qu’au 1T 2022. Le cumul des parts en attente de cessions et des retraits non compensés connaît lui aussi une progression « notable ». Au 30 juin 2023, il représentait 0,35% de la capitalisation globale du marché des SCPI (93,5 Md€). Contre 0,16 % à fin 2022…
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A propos de l’ASPIM(i)
L’Association française des Sociétés de Placement Immobilier (ASPIM) représente et défend les intérêts de ses adhérents, les gestionnaires de fonds d’investissement alternatif (FIA) en immobilier (SCPI, OPCI et autres FIA « par objet »). Créée en 1975, l’ASPIM est une association à but non lucratif qui réunit tous les acteurs du métier de la gestion des fonds immobiliers non cotés. En France, au 31 décembre 2022, les FIA en immobilier représentaient une capitalisation totale de 314 milliards € et 4 millions d’épargnants.
Le nombre total des membres de l’ASPIM s’élève à 133, dont 106 Sociétés de Gestion de Portefeuille (SGP) agréées par l’AMF, filiales de groupes bancaires, d’assurance, de gestion immobilière étrangère ou entrepreneuriales, et 27 experts correspondants qui sont des professionnels de l’écosystème immobilier et financier (avocats, consultants, auditeurs et experts).
A propos de l’IEIF(i)
Créé en 1986, l’IEIF est un centre d’études, de recherche et de prospective indépendant spécialisé en immobilier. Son objectif est de soutenir les acteurs de l’immobilier et de l’investissement dans leur activité et leur réflexion stratégique, en leur proposant des études, notes d’analyses, synthèses et clubs de réflexion. L’approche de l’IEIF intègre l’immobilier à la fois dans l’économie et dans l’allocation d’actifs. Elle est transversale, l’IEIF suivant à la fois les marchés (immobilier d’entreprise, logement), les fonds immobiliers (cotés : SIIC, REIT ; non cotés : SCPI, OPCI, FIA) et le financement.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.