Le secteur continue néanmoins de pâtir de la dichotomie entre valeurs cycliques – délaissées par les investisseurs – et valeurs de croissance résilientes – logistique, résidentiel, immobilier alternatif… -. Ce rapport ne devrait pas changer au cours des prochaines semaines, estime Laurent Saint Aubin, gestionnaire actions spécialiste de l’immobilier européen chez Sofidy, dans sa dernière analyse.
Le phénomène de dislocation de l’immobilier coté, à l’œuvre depuis le début de la crise sanitaire de 2020, s’est poursuivi lors de la première moitié de l’année 2021.
Les écarts se creusent de nouveau entre valeurs cycliques et valeurs de croissance
Et jusqu’à aujourd’hui. Entre, d’une part, les valeurs cycliques – comme les foncières de bureaux et de commerces -, délaissées par les investisseurs, et, d’autre part, les valeurs résilientes, de croissance – logistique, résidentiel et immobilier alternatif (tours télécoms, data centers…) -, qui suscitent leur appétit. Si l’on a constaté une réduction de l’écart de performance entre les deux segments durant une courte phase, allant de l’annonce de l’efficacité d’un vaccin contre la Covid-19 début novembre 2020, jusqu’au premier trimestre 2021, depuis, les écarts de performances se creusent de nouveau entre les deux segments.
Une dichotomie qui pèse sur la performance globale du secteur immobilier
Cette dichotomie pèse sur la performance de l’immobilier coté, puisque la partie cyclique est bien plus représentée dans les indices immobiliers. Ainsi, l’immobilier coté affiche une sous-performance par rapport au reste de la cote. Au 10 septembre, l’indice immobilier de référence, le FTSE EPRA Eurozone, affichait un gain de +8,23%. Contre +19,50% pour l’indice STOXX Europe 600.
La menace de la « stagflation », qui inquiète les investisseurs, impacte la partie du secteur sensible au cycle économique – qui enregistre toujours des difficultés depuis le début de la crise sanitaire – : le commerce physique et les bureaux.
Pour le premier, les grandes enseignes continuent de subir les gains de parts de marché du commerce électronique. Elles restructurent leurs portefeuilles, ferment des boutiques, enregistrent des hausses de vacance…
Concernant les bureaux, ce sont ceux situés en périphérie qui souffrent le plus de la montée en puissance du travail à distance.
Stockage, logement et logistique : maintien de la valeur des actifs
Stockage, logement et logistique vont demeurer les segments les plus à même de maintenir la valeur de leurs actifs en cas de rebond durable de l’inflation. Le « Pricing Power » existe dans la logistique, qui est le pendant de l’immobilier de commerce. De même pour le segment du stockage pour les particuliers, qui devrait continuer à aiguiser l’appétit des investisseurs institutionnels. Ainsi que celui des tours télécoms. Ces segments devraient enregistrer des hausses de leurs taux d’occupation et des loyers à même de faire face à la stagflation.
Voyants toujours au rouge pour l’immobilier de commerce et les bureaux
À l’inverse, pour l’immobilier de commerce et l’immobilier de bureaux, tous les voyants vont rester dans le rouge. La baisse de la vacance et les baisses des prix à bail vont perdurer. Les deux leçons de la crise sanitaire étant que les commerçants auront appris à vendre en ligne. Et que les non-cadres peuvent eux aussi travailler à distance, déplaçant le phénomène du télétravail de l’immobilier de centre-ville vers les bureaux de périphérie, avec une baisse des surfaces mises à bail et des loyers. Pour autant, des opportunités peuvent voir le jour sur le marché boursier dans ces deux segments, dans le cadre d’une gestion en « stock-picking ».
Le statut du résidentiel suspendu au résultat des élections fédérales allemandes
Reste la composante « logement » qui pourrait évoluer, dans les prochaines semaines, au gré de la probabilité d’une victoire de la coalition menée par Olaf Scholz aux élections fédérales allemandes. Certains de ses alliés inquiétant en effet les investisseurs en raison de leur volonté d’aller plus loin dans les mécanismes de limitation des loyers. Les craintes sont vives, à l’image de celles suscitées par les autorités berlinoises confrontées à la tenue d’un référendum pour réclamer l’expropriation des grandes sociétés immobilières de la capitale allemande…
Laurent Saint Aubin
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A propos de Laurent Saint Aubin
Laurent Saint Aubin a débuté sa carrière en 1986 comme analyste financier à la Banque de l’Union européenne avant de rejoindre la société de Bourse Ferri puis le CCF. Il a été ensuite directeur général d’ING France Securities en charge des activités de marché Actions à Paris, puis, à compter de 2006, responsable des activités de vente et de recherche sur l’immobilier coté au sein du groupe Aurel BGC. Membre de la SFAF, il a reçu en 2012 le trophée du meilleur analyste des sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC). Depuis 2014, il gère le FCP Sofidy Sélection 1, où il développe une gestion discrétionnaire visant à « surperformer, via une exposition aux actions du secteur immobilier de l’Union européenne, l’indicateur de référence FTSE EPRA/NAREIT Euro Zone Capped dividendes nets réinvestis ».