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Pour les contribuables, l’automne n’est jamais une bonne saison. Non seulement les feuilles d’impôt tombent – et elles ont tendance à être chaque année plus lourdes-, mais le Parlement prépare les mesures qui s’appliqueront l’année suivante et c’est très rarement dans le sens d’un allègement. Les secousses qui ont agité les marchés dans le sillage de la crise grecque ne pouvaient laisser présager rien de bon pour 2011. Avec des investisseurs en obligations émises par les Etats désormais prompts à réagir au moindre dérapage des finances publiques, l’heure n’est pas aux cadeaux. Même là où les dépenses sont fortement réduites, comme en Grande-Bretagne, le but est pour l’instant de réduire les déficits, pas les impôts. Au contraire même, comme le dit David Cameron, le nouveau Premier ministre britannique, « les épaules les plus larges portent le poids le plus lourd ». Sur le plan des principes, il n’y a rien à dire. Mais le fait est là : ceux qui payaient déjà beaucoup d’impôts vont devoir en payer davantage.
En France, le débat est pimenté par la question d’une éventuelle suppression du bouclier fiscal. Comme la création de ce fameux bouclier était liée à l’existence de l’impôt sur la fortune, du coup on reparle aussi de l’avenir de cet impôt. Et on s’aperçoit que l’impôt sur la fortune ne rapporte peut-être pas des sommes considérables (3,13 milliards l’an dernier), mais que le supprimer purement et simplement poserait des problèmes à Bercy. Pour l’instant, il serait donc seulement question de l’alléger.
En tout cas, pour le législateur, la situation devient compliquée : compte tenu des engagements pris par le Président de la République, il est difficile d’augmenter franchement l’impôt sur le revenu. Et comme on ne veut pas toucher aux revenus du travail, on s’attaque discrètement aux revenus de l’épargne. Comme si l’épargnant appartenait à une catégorie sociale à part, à un monde où l’on ne travaille pas et où on vit de ses rentes ! Alors que les épargnants sont des gens qui travaillent et qui ont pour seul tort de mettre de l’argent de côté pour leurs vieux jours. Mais tous ces épargnants, à la différence des plus grandes fortunes, ne vont pas se délocaliser. Leur épargne reste en France, surtout, par la force des choses, si elle est constituée d’immobilier. Alors on augmente le taux de l’imposition sur les plus-values mobilières et immobilières, on soumet ces plus-values aux prélèvements sociaux quand ce n’était pas encore le cas, on supprime le crédit d’impôt sur les dividendes, etc.
Toutes ces mesures ne sont pas absurdes. Par exemple, la suppression du seuil de cession pour les plus-values mobilières aura au moins l’avantage de simplifier la vie des investisseurs boursiers qui hésitaient parfois à vendre par crainte de faire tourner le compteur des cessions. De même, on s’achemine vers un taux identique pour l’imposition des plus-values mobilières et immobilières, ce qui est assez logique. Ce qui est regrettable, c’est que, en France, la logique fiscale conduit toujours à des augmentations ; quand on nivelle, c’est (presque) toujours par le haut, jamais (ou rarement) en abaissant les taux les plus élevés. Et après, on s’étonne que les gens soient si friands de niches fiscales…
Gérard Horny