Tout le monde en convient : le logement pèse d’un poids toujours plus élevé dans le budget des ménages, qu’il s’agisse des loyers ou du remboursement des emprunts ayant permis l’accès à la propriété. A partir de là, les analyses divergent, y compris parmi les experts proches du pouvoir. Le Centre d’Analyse Stratégique, rattaché au Premier ministre, s’interroge, dans une étude publiée en avril, sur le prix des logements, apparemment déconnecté de l’évolution des loyers : au cours des trente dernières années, le prix réel (corrigé de l’inflation) des logements anciens a été multiplié par deux tandis que, sur la même période, les loyers réels progressaient de 30 %. Dans ces conditions, il paraît logique de parler d’une surévaluation des logements ou, pour employer les mots qui fâchent, d’une « bulle sur le marché immobilier français ».
Lors de la présentation d’une étude sur les prix des logements anciens et les loyers entre 2000 et 2010, le 17 mai dernier, Jean-Philippe Cotis, directeur général de l’Insee, s’est montré beaucoup plus nuancé. La thèse d’une bulle ne lui paraît pas évidente : « En France, nous sommes sans doute confrontés, pour une large part, à un déséquilibre issu de la sphère réelle, dans la mesure où, malgré la crise financière, les prix de l’immobilier ne baissent pas ».
Construire là où les besoins sont les plus grands
Ce point de vue est assez proche de celui que défend l’IEIF (Institut de l’Epargne Immobilière et Foncière), dont les différentes études publiées depuis un an insistent toutes sur un point essentiel : il n’y a pas un marché du logement, mais des marchés locaux plus ou moins équilibrés, les prix montant le plus, de façon logique, là où le marché est le plus tendu (avec une production de logements qui ne suit pas la croissance du nombre de ménages), comme en Ile de France ou dans certaines villes de province.
En clair, il faut construire des logements neufs là où il y en a vraiment besoin. En dehors du logement social, qui occupe déjà une place très importante en France, deux solutions existent : l’aide à l’accession à la propriété ou l’encouragement à l’investissement locatif. Mais, dans les zones où le marché est le plus tendu, l’accession à la propriété est devenue pratiquement impossible pour les primo-accédants (ceux qui ne sont pas déjà propriétaires et ne peuvent revendre un logement pour en acheter un autre plus grand ou mieux situé) aux revenus modestes ou moyens. L’investissement locatif paraît indispensable.
Or, il connaît des ratés. Selon les statistiques publiées par la Fédération des promoteurs immobiliers, les ventes du premier trimestre sont en repli de 24 % par rapport à la même période de l’année précédente et ce recul s’explique en partie par une très forte baisse des ventes aux investisseurs dans le cadre du dispositif Scellier : – 35 % par rapport au premier trimestre 2010 et -46 % par rapport au quatrième trimestre 2010.
Dans ce contexte, la réduction de l’avantage fiscal de l’investissement en Scellier pour cause d’économies budgétaires est-elle une bonne idée ? Dans une période de rabotage général de toutes les niches fiscales, il paraissait difficile de faire une exception. Mais deux points doivent être notés. D’abord le Scellier n’est pas un mauvais dispositif car il permet d’orienter les investissements à la fois vers les zones géographiques et les niveaux de loyers où les besoins sont les plus criants. Ensuite, ce dispositif fait face peut-être à certaines difficultés dans le cadre de l’investissement direct (un particulier achète un appartement pour le louer), mais il rencontre un succès qui ne se dément pas dans le cadre de l’investissement collectif par le biais des SCPI dites Scellier.
Les SCPI Scellier toujours recherchées
En 2010, c’est 920 millions d’euros qui ont ainsi été collectés. En 2011, malgré la diminution de l’avantage fiscal, il est vraisemblable qu’un niveau au moins aussi élevé sera atteint. Les informations récentes que vous avez pu lire sur pierrepapier.fr le laissent supposer : non seulement les sociétés de gestion qui avaient lancé des SCPI Scellier l’an dernier en préparent ou en ont déjà lancé de nouvelles, mais d’autres sociétés de gestion arrivent sur ce créneau ; c’est notamment le cas de Primonial, dont le dynamisme commercial n’est plus à démontrer et dont les ambitions sont évidentes, ou d’Euryale.
Bien évidemment, ce ne sont pas les SCPI Scellier seules qui permettront de résoudre le problème du logement. Il faudra adopter bien d’autres mesures et, surtout, les inscrire dans la durée : le problème du logement n’est pas un problème conjoncturel. Mais, bien encadrés et bien calibrés, de tels dispositifs restent le meilleur moyen d’amener les capitaux là où on souhaite qu’ils aillent.
G. H.