Parmi les produits d’investissement disponibles aujourd’hui, seule la SCPI est dotée d’un statut de « civile ». Pour l’essentiel, cela lui donne une fiscalité originale et avantageuse. Mais peut-être aimeriez-vous en savoir un peu plus…

Du commercial, de l’associatif et du civil

Une société civile est un ensemble de personnes qui se sont réunies pour satisfaire un intérêt commun.

Dans l’organisation moderne des rapports et des échanges, une société civile se définit par la négative. Ce n’est ni une association, ni une société commerciale.

  • Une association est un groupe de personnes constitué autour d’un objectif social, culturel, humanitaire ou religieux.
  • Une société commerciale est une structure économique constituée autour de l’activité consistant à fournir des biens et des services. Le terme “commercial” est ici légèrement trompeur car recouvre dans la pratique plusieurs types d’activités, à savoir l’industrie, le commerce ou la prestation de services. Au-delà du domaine juridique, c’est le mot « entreprise » qui prédomine aujourd’hui.

Entre l’association et la société commerciale (ou entreprise), deux entités aux contours nettement définis, il reste un petit espace laissé à la société civile.

Trois sortes de sociétés civiles

Il y a essentiellement trois domaines relevant des sociétés civiles : les activités d’exploitation de la nature, l’exercice de professions libérales, et la détention et mise en location de biens immobiliers.

  • La production agricole et l’exploitation minière sont souvent organisées sous forme de sociétés civiles. A l’inverse, dès que le commerce ou la transformation entrent en jeu, autrement dit dès que quelqu’un se charge de recueillir des produits agricoles pour les distribuer, ou de rassembler des matières premières pour les commercialiser ou pour fabriquer des produits plus élaborés, on entre dans le domaine des sociétés commerciales, donc des entreprises.
  • Des professionnels dont l’exercice est réglementé, comme des avocats, des dentistes ou des médecins peuvent se grouper pour partager des locaux, un secrétariat ou des moyens informatiques. Ils le font alors dans le cadre d’une « société civile professionnelle ».
  • La détention de biens immobiliers dans une optique de location entre également dans le cadre des sociétés civiles. Il n’y a aucune transformation de matière première en produits plus élaborés : un appartement peut au mieux être rénové, mais il ne devient pas réellement autre chose que ce qu’il était au départ. Il n’y a aucune mise sur le marché de produits destinés à circuler : les immeubles ou les appartements sont seulement mis à la disposition des locataires. La notion de société commerciale ne s’impose donc pas. L’association est également à écarter, puisque l’intérêt financier, manifestement présent, impose la notion de société. Reste donc la société civile, que l’on appelle alors une “Société Civile Immobilière” (SCI).

Une Société Civile Immobilière est donc un groupement de personnes qui se sont rassemblées pour posséder en commun un ou plusieurs biens immobiliers. Même si chacun détient un certain nombre de parts, et même si les recettes nettes de charges sont distribuées au prorata des parts détenues, chaque associé est imposé fiscalement comme s’il était directement propriétaire des biens immobiliers – c’est la fameuse “transparence fiscale” – et chacun reste entièrement responsable vis-à-vis des tiers. C’est pratiquement tout ce qu’il faut savoir sur la question.

De la SCI à la SCPI

Après cette brève, et très sommaire, incursion dans le monde des concepts juridiques, nous pouvons aborder directement les SCPI, qui ne sont qu’une catégorie particulière de sociétés civiles immobilières.

C’est d’ailleurs un aspect surprenant, en quelque sorte une anomalie génétique. Dans le monde de l’épargne, le législateur a pris soin de ne créer des sociétés commerciales. La SICAV, qui fonctionne comme une copropriété de valeurs mobilières, a le statut de société commerciale [1]. La Foncière, société cotée en Bourse spécialisée dans la détention et la mise en location d’immeubles, est une société commerciale (de nos jours la plupart des Foncières sont des SIIC). Les OPCI qui se développent depuis peu sont des sociétés commerciales. Ces formules proposées à l’épargne immobilière sont traitées à de nombreux endroits sur ce site. Retenons seulement que la SCPI, seule, est une société civile.

Ainsi l’a voulu la loi du 31 décembre 1970, qui a donné et le nom et les modalités de la SCPI.

Lire : L’aventure des SCPI – Saison 1, épisode 8 : le dénouement

Dans la pratique usuelle, une Société Civile Immobilière est constituée autour d’un immeuble : un ensemble d’appartements, un ensemble d’associés.

Si une SCI veut être grande, regrouper un nombre élevé d’associés, collecter des capitaux importants, détenir beaucoup d’immeubles, elle doit s’appeler Société Civile de « Placement » Immobilier et respecter en tous points la loi de 1970 et les textes ultérieurs.

[1] – Exception à la règle : le Fonds Commun de Placement garde un statut juridique de copropriété. Mais dans la pratique il s’est considérablement rapproché des SICAV.

La protection des investisseurs

Nous tenons, dès lors, notre définition : une SCPI est une SCI qui regroupe un très grand nombre d’investisseurs.

Qu’a-t-elle de moins, qu’a-t-elle de plus qu’une banale Société Civile Immobilière ? En moins la responsabilité des associés, en plus tout l’arsenal de la protection de l’épargne.

La responsabilité des associés

Dans une société civile, tous les associés sont indéfiniment responsables vis-à-vis des tiers en cas de problème : indéfiniment, cela veut dire qu’ils doivent répondre de l’ensemble des dettes éventuellement contractées, chaque associé proportionnellement à sa part dans la société. Il y a donc, dans la structure juridique de la société civile, un risque inhérent qui en limite naturellement l’usage.

Il va de soi que dans une Société Civile Immobilière, le risque est considérablement réduit. Imaginons un scénario catastrophe : il faudrait par exemple que la SCI ait contracté un emprunt de la valeur de l’immeuble, que l’immeuble se soit écroulé, qu’en s’effondrant il ait commis des dommages graves alentour et qu’en plus de tout cela, la SCI ait été jusqu’à omettre de souscrire les assurances normales, pour que les associés voient leur responsabilité personnelle engagée. Ou encore, il faudrait que les fonds aient été détournés au lieu de servir à acheter l’immeuble, qu’en plus de cela, des dettes importantes aient été contractées, et que, pour couronner le tout, le coupable ait disparu dans un paradis fiscal sans laisser, avant de partir, ni bien, ni héritier, ni complice, pour que les créanciers se tournent vers les associés de la SCI.

On voit bien que le risque inhérent à la structure juridique d’une Société Civile Immobilière est plutôt du domaine de l’invraisemblable, mais il n’est pas totalement exclu.

Dans une SCPI, la porte a été fermée à toute éventualité de ce genre. Ainsi dans le cas d’un extraordinaire scénario catastrophe (encore plus improbable que pour une SCI classique compte tenu de tous les verrous installés par ailleurs), la responsabilité de l’associé n’est ni solidaire, ni indéfinie, elle est limitée montant de son apport.

Toutes ces considérations peuvent vous sembler faire appel à une imagination à la fois morbide et débridée, d’autant plus que, dans toute l’histoire des SCPI, il n’y a pas un seul exemple qui s’approche un tant soit peu de tels événements pour romans noirs, mais le monde juridique est ainsi fait qu’il travaille sur l’hypothétique autant que sur le réel, et que, pour définir une protection, il faut imaginer le pire.

Disons qu’en pratique, l’associé d’une SCPI n’est guère plus engagé aujourd’hui que le souscripteur d’un OPCVM.

La protection de l’épargne

Concrètement, le système des SCPI prévoit la présence d’un conseil de surveillance composé d’associés, le contrôle des commissaires aux comptes, la diffusion régulière d’informations répondant à des normes précises, le contrôle aussi d’un organisme dépositaire et la tutelle de l’AMF – l’Autorité des Marchés Financiers – sans compter tout ce qu’impose désormais aux gestionnaires de SCPI la directive européenne AIFM (En anglais : Alternative Investment Fund Managers. En français : Gestionnaires de Fonds d’Investissement Alternatifs, c’est la réglementation qui s’applique aux sociétés de gestion de SCPI) et aux distributeurs du produit SCPI la directive MIFID 2 (En anglais : Markets in Financial Instruments Directive. En français : Directive sur les Marchés de Produits Financiers, c’est la réglementation qui s’applique à la distribution des parts de SCPI).

Pour le reste, les SCPI sont encore des Sociétés Civiles Immobilières, et cela se retrouve surtout dans la fiscalité. Chaque associé est considéré fiscalement comme un propriétaire immobilier.

  • Il s’en aperçoit lorsqu’il remplit sa déclaration annuelle de revenus.
  • Il s’en aperçoit lorsqu’il décide de recourir à l’emprunt pour acheter des parts de SCPI : les intérêts de l’emprunt sont intégralement déductibles de ses revenus immobiliers.
  • Il s’en aperçoit enfin lorsqu’il revend ses parts : c’est le régime des plus-values immobilières qui s’applique alors.

Et voilà ! Nous en avons fini avec l’explication du sigle SCPI – Société « Civile » de « Placement » Immobilier.

Heureusement, il y a des définitions plus dynamiques !

Lire aussi :

La définition qui a démarré la grande aventure des SCPI