La perspective d’une remontée graduelle des taux d’intérêt a un impact négatif sur la valorisation des actifs réels. Dont l’immobilier. L’augmentation de la prime de risque peut toutefois être compensée par une remontée des loyers. « Quand cela est possible », rappelle Laurent Saint Aubin, gestionnaire actions spécialiste de l’immobilier européen chez Sofidy, dans sa dernière analyse.
L’indice des foncières cotées en zone euro a rebaissé de 2,7 % en novembre. La performance positive des segments des entrepôts logistiques et du stockage pour les particuliers a été contrebalancée par le recul des foncières de commerce et des acteurs du bureau[1].
Remontée graduelle des taux d’intérêt, un impact négatif sur la valorisation des actifs réels
La perspective d’une remontée graduelle, mais plus rapide qu’initialement anticipé, des taux d’intérêt – sous l’effet du maintien durable d’un rythme de hausse des prix élevé – a logiquement un impact négatif sur la valorisation des actifs réels. Dont l’immobilier. Les investisseurs vont en effet être enclins à exiger, toutes choses égales par ailleurs, une rentabilité supérieure par rapport à la rentabilité d’un placement en obligations d’Etat dont la rémunération, rappelons-le, s’élève en fonction de l’évolution des taux. Mais qu’entend-on par « toutes choses égales par ailleurs » ?
Hausse de la prime de risque
D’abord, le niveau de risque relatif qui définit le surcroît de rémunération destiné à rémunérer une prise de risque plus élevée (qualifiée de prime de risque).
À titre d’exemple, la hausse tendancielle de la part de marché des commerçants électroniques au détriment du commerce physique favorise l’exigence d’une prime de risque plus élevée sur ces actifs. Ce qui entraîne une baisse de la valorisation des espaces commerciaux. Cela se traduit dans le cas de la foncière néerlandaise Wereldhave, vendeuse forcée pour des raisons stratégiques de quatre centres français (notés B en termes de qualité) en juillet dernier pour 305 M€, par un taux de capitalisation de 7,5% et 2 070 €/m². A comparer avec le prix payé pour ces centres (plus deux, de qualité inférieure), en décembre 2014 : 850 M€ . Soit un prix au mètre carré de 4 300 € et un taux de capitalisation de 5,2 %[2]. Ces centres avaient en outre fait l’objet de 100 M€ d’investissement de modernisation.
La question des loyers
Ensuite, la question des loyers. Une hausse des taux d’intérêt peut être compensée par une hausse des loyers. Lorsqu’elle est possible… C’est ainsi que Segro, leader européen de l’immobilier logistique (dont le cours de Bourse a progressé de 50 % depuis le début de l’année) devrait enregistrer une croissance moyenne de ses loyers de 4,2 % sur la période 2022-2024. Contre 3,6 % en moyenne sur la période 2018-2020[3]. Dont près de la moitié issue de la réversion (niveau des loyers à la relocation). Et avec une montée en puissance de l’Europe continentale, traditionnellement en retard par rapport au Royaume-Uni. L’accélération observée entraînera une baisse accrue des taux de capitalisation. Le patrimoine de Segro devrait voir, selon Kempen, son taux de capitalisation s’établir à 3 % en 2025. Contre 4,5 % en 2017.
Ecart avec les valorisations relevées sur les transactions privées
Et donc une hausse des valorisations, les investisseurs étant dans ce cas de figure disposés à accepter une prime de risque plus basse.
Notons enfin que la fonction « anticipatrice » de la Bourse peut favoriser un écartement avec les valorisations relevées sur les transactions privées. Constituant, in fine, un parachute protecteur pour les investisseurs boursiers : le rachat en cours de la foncière de bureaux allemande Alstria par Brookfield AM, avec une prime de 17% sur le dernier cours de Bourse, en est l’illustration.
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A propos de Laurent Saint Aubin
Laurent Saint Aubin a débuté sa carrière en 1986 comme analyste financier à la Banque de l’Union européenne avant de rejoindre la société de Bourse Ferri puis le CCF. Il a été ensuite directeur général d’ING France Securities en charge des activités de marché Actions à Paris, puis, à compter de 2006, responsable des activités de vente et de recherche sur l’immobilier coté au sein du groupe Aurel BGC. Membre de la SFAF, il a reçu en 2012 le trophée du meilleur analyste des sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC). Depuis 2014, il gère le FCP Sofidy Sélection 1, où il développe une gestion discrétionnaire visant à « surperformer, via une exposition aux actions du secteur immobilier de l’Union européenne, l’indicateur de référence FTSE EPRA/NAREIT Euro Zone Capped dividendes nets réinvestis ».
A propos de Sofidy(i)
Depuis 1987, Sofidy conçoit et développe des produits d’investissement et d’épargne (SCPI, OPCI, SCI, SIIC, OPCVM Immobilier, Fonds dédiés) orientés principalement vers l’immobilier de commerces et de bureaux. Gestionnaire de référence dans le paysage de la gestion d’actifs immobiliers en France et en Europe, Sofidy est régulièrement distingué pour la qualité et la régularité des performances de ses fonds. Sofidy gère pour le compte de plus de 50 000 épargnants, et un grand nombre d’institutionnels, un patrimoine immobilier d’une valeur de près de 6,7 milliards d’euros ; constitué de plus de 4 200 actifs commerciaux et de bureaux. Sofidy est une filiale de Tikehau Capital.
(i)Information extraite d’un document officiel de la société
[1] Le fonds Sofidy Sélection 1, de par son exposition à la logistique (18,9 %) et à l’entreposage pour les particuliers (7,4 %), a pour sa part surperformé l’indice de 2,5 %.[2] Source GreenStreet.
[3] Estimation Kempen