Antoine Depigny et Xavier Cheval, respectivement directeur des fonds retail et directeur du pôle santé chez Praemia REIM, détaillent la stratégie du groupe sur l’immobilier de santé. Et l’état des deux véhicules grand public -Primovie et Cap Santé- investis sur ce segment de marché. Interview.
Frédéric Tixier – L’immobilier de santé n’est pas un secteur monolithique, il englobe plusieurs sous-segments. Lesquels privilégiez-vous actuellement ?
Praemia REIM : une spécialisation sur les actifs de santé accueillant les soins les plus lourds
Xavier Cheval – Traditionnellement, nous nous sommes spécialisés sur les actifs immobiliers qui accueillent les soins les plus lourds, les plus techniques, destinés aux patients ou aux résidents. Il s’agit notamment d’établissements hospitaliers et d’EHPAD. Ce sont des lieux où l’activité médicale est intense, et donc généralement occupés par des locataires disposant de solides capacités financières. Mais si l’on considère l’ensemble du spectre de ce qu’on appelle aujourd’hui « immobilier de santé », on y trouve également des centres de soins de ville – pour la médecine générale ou spécialisée –, des laboratoires d’analyses médicales, des locaux d’imagerie. Ou encore des résidences services seniors, qui ne sont pas nécessairement médicalisées.
Frédéric Tixier – Mais concrètement, quels sont ceux dans lesquels vous investissez ?
Une préférence pour les bâtiments présentant un certain niveau de technicité
Xavier Cheval – Nous favorisons clairement les actifs où l’intensité des soins est la plus élevée. Cela inclut des établissements hospitaliers de grande taille – certains atteignent 50 000 m² dans notre portefeuille. Les EHPAD ou les maisons de retraite sont plus petits, autour de 4 000 à 5 000 m² pour 80 à 100 lits. Nous allons plus rarement vers des structures de petite taille, même si une tendance actuelle consiste à développer des centres de soins spécialisés avec des plateaux techniques réduits. Cela dit, nous avons une préférence pour les bâtiments présentant un certain niveau de technicité.
Frédéric Tixier – Parlons fonds immobiliers. Praemia REIM propose aujourd’hui deux véhicules à destination du grand public : la SCPI Primovie et l’unité de compte Cap Santé. La première a vu son prix de part baisser en début d’année. Quel est l’état de santé – sans jeu de mots – de ces deux produits, Antoine ?
La valorisation de la SCPI Primovie révisée à la baisse en début d’année
Antoine Depigny – Sans jeu de mots… ! Je rappelle juste que nous gérons aujourd’hui 17 milliards d’euros. Alors bien sûr, la taille n’est pas tout, mais cela reste significatif. Concernant Primovie : oui, son prix de part a été révisé à la baisse. L’une des raisons est que son portefeuille comporte environ 20 % de bureaux. Certes, ces bureaux sont loués à des acteurs du secteur de la santé – comme Doctolib ou la Haute Autorité de Santé. Ce sont malgré tout des bureaux. Et évalués comme tels… Ceci explique pourquoi nous avons été conduits à ajuster la valorisation. Nous avons aussi fait ce choix afin de repositionner le prix au centre de la fourchette de valorisation, dans une optique de renforcement de l’attractivité du produit.
Frédéric Tixier – Quid du patrimoine réellement « santé » ?
Cap Santé, très investi sur le segment des cliniques
Antoine Depigny – Pour le reste, la SCPI reste extrêmement saine : elle dispose de baux très longs – en moyenne 12 ans – et d’un taux d’occupation proche de 100 %. Cela garantit une excellente visibilité sur les loyers. Quant à Cap Santé, c’est un véhicule accessible via l’assurance-vie, structuré autour de deux investissements majeurs réalisés aux côtés d’institutionnels. Il est majoritairement investi en court séjour, notamment via l’ancien portefeuille d’Icade Santé, d’une qualité rare sur le marché. Il bénéficie de toute l’expertise des équipes de Xavier. La part des cliniques y est bien plus importante que dans d’autres véhicules. Ce fonds a connu une légère baisse de performance récemment, après deux années de hausse très soutenue. On revient aujourd’hui à un niveau de rendement plus classique, autour de 4,5 %.
Comment gérer un véhicule sans collecte ?
Frédéric Tixier – Dans un contexte où la collecte s’est nettement ralentie, disons même tarie – on ne va pas se mentir –, quels sont les arbitrages que vous effectuez aujourd’hui, notamment sur Primovie ?
Antoine Depigny – Effectivement, en l’absence de collecte mais avec des patrimoines significatifs à gérer, notre stratégie repose sur la rotation des actifs. Nous vendons les immeubles que nous considérons comme matures. Ceux dont la situation locative est stabilisée. Qui ne nécessitent pas de travaux majeurs. Et sur lesquels nous estimons que notre intervention n’ajouterait pas de valeur. Parallèlement, nous poursuivons notre accompagnement des locataires à travers des travaux de modernisation – qu’il s’agisse de CAPEX courants ou de restructurations plus lourdes. Cela permet de générer de nouvelles activités pour nos occupants.
Quand une SCPI devient une foncière…
Frédéric Tixier – Donc si je comprends bien, une SCPI qui a atteint une taille significative n’est pas forcément handicapée par l’absence de collecte. Elle fonctionne alors comme une foncière capable de gérer activement un portefeuille et de continuer à distribuer des revenus ?
Antoine Depigny – C’est exactement ça. Le prix de l’immobilier de santé de qualité n’a pas vraiment baissé par rapport à il y a deux ans. Ce qui signifie que si nous devions reconstituer un portefeuille de la même qualité, assorti du même niveau d’exigences, nous achèterions des actifs à des prix similaires. Sauf que le niveau des transactions est aujourd’hui très faible. Le fait de disposer d’un portefeuille aussi dense et qualitatif est donc une véritable opportunité. Et nous savons que ces véhicules génèrent suffisamment de revenus pour entretenir le patrimoine et poursuivre leur fonctionnement quasiment normalement.
Frédéric Tixier – On comprend donc qu’il peut être opportun aujourd’hui d’investir dans une SCPI santé temporairement décotée… Dont acte…
Propos recueillis le 2 juillet 2025
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A propos de Praemia REIM(i)
Praemia REIM est un gestionnaire d’actifs immobiliers européen de premier plan, avec plus de 36 milliards d’euros d’actifs sous gestion et un portefeuille de plus de 1 600 immeubles dans 11 pays. La société conçoit et gère une large gamme de solutions d’investissement immobilier, couvrant les secteurs de bureaux, santé et éducation, commerce de détail, résidentiel et hôtellerie, avec un fort engagement en faveur de la performance à long terme et de l’intégration ESG. Elle compte plus de 450 collaborateurs répartis entre la France, l’Allemagne, le Luxembourg, l’Italie, l’Espagne, Singapour et le Royaume-Uni.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.