Bruno Rouleau, administrateur de l’association CNCEF Crédit, commente l’actualité des marchés du crédit immobilier. La -timide- reprise qui s’amorce depuis le début de l’année est-elle durable ? A quelles conditions ? Interview.
L’association CNCEF Crédit, en un mot ?
Bruno Rouleau – CNCEF Crédit est une association professionnelle agréée. Elle a été instaurée par la réforme du courtage, il y a maintenant 3 ans. Son but ? Equilibrer, réguler le marché du courtage en crédit…
Combien d’adhérents ?
Bruno Rouleau – Plus de 8 000 structures ont adhéré à l’association, avec une forte augmentation ces derniers mois, du fait de la réforme. Beaucoup de structures ont en effet choisi CNCEF Crédit, parmi d’autres associations possibles.
Est-ce l’association la plus importante du secteur ?
Bruno Rouleau – En termes de structures adhérentes, c’est sans doute l’une des deux plus importantes, oui.
Et vous, à titre personnel, vous représentez quelle structure ?
Bruno Rouleau – Je suis porte-parole et directeur de l’innovation et de la stratégie de AFR Financement, un réseau de franchise en courtage. Toutes formes de courtage…
Sur quels sujets travaille plus particulièrement votre association aujourd’hui ?
Bruno Rouleau – Aux côtés de sujets plus génériques, liés au fonctionnement de l’association, ce qui nous préoccupe actuellement ce sont les conditions dans lesquelles les acteurs du marché vont pouvoir continuer à exercer, correctement et de manière pérenne, leurs missions. L’environnement du crédit a en effet été très « chahuté » ces deux dernières années. Les acteurs vont en outre être confrontés à de nouveaux défis ces prochaines années, du fait notamment de la digitalisation et de l’intelligence artificielle.
2023 a été une année de contraction des marchés du crédit. On parle d’une reprise en 2024, du retour des établissements bancaires. Le ressentez-vous au quotidien ?
Bruno Rouleau – 2023 a été une année très singulière. Avec la conjonction de plusieurs facteurs. Le premier était de fait le désengagement des établissements bancaires, en raison de conditions de marchés qui leur étaient défavorables. C’est le deuxième point : un marché « crispé », dans tous les sens du termes. En termes de réglementation, d’organisation et, bien sûr, du fait de la hausse des taux, notamment du taux d’usure. Aujourd’hui, en revanche, on observe effectivement un retour des banques, désireuses de capter de nouvelles clientèles…
Pour générer du chiffre d’affaires…
Bruno Rouleau – Exactement. Et pour renouveler leurs portefeuilles de clientèles
Grâce à la détente des taux d’intérêt…
Bruno Rouleau – C’est surtout le retour d’une meilleure visibilité. Ce qui bloquait le marché, c’était l’incertitude. Qui posait un vrai problème aux directions financières des banques. Je rappelle que le marché français du crédit est un marché de taux fixe, pour les emprunteurs finaux. Mais que les banques, elles, se refinancent à taux variable. Aujourd’hui, cette meilleure visibilité sur l’évolution des taux conduit effectivement les établissements bancaires à revenir sur le marché. Et ce d’autant plus que les signes avant-coureurs indiquent une baisse des taux plutôt durable, à conditions géopolitiques constantes…
Les acquéreurs se manifestent de nouveau. Ce qui serait le signe d’un arrêt de la défiance des investisseurs pour le placement immobilier. Le ressentez-vous dans le profil des demandeurs de prêts ?
Bruno Rouleau – Je serais plus nuancé. Il y a, effectivement, un frémissement. Il faut rappeler que le marché s’est en réalité contracté par obligation. Mais que l’appétence pour l’immobilier, boostée par l’effet positif de l’après Covid, est toujours bien présente. Pour qu’elle se manifeste réellement de nouveau, il faudrait toutefois que les conséquences de la raréfaction du crédit – la baisse des prix des actifs- soient plus nettes. Or, les prix du marché immobilier n’ont pas beaucoup baissé…
Les prix ont baissé. Mais pas suffisamment ?
Bruno Rouleau – Selon les localisations, les prix ont reculé de 4% à 6%, en valeur médiane. Ce qui signifie que certaines zones n’ont en réalité pas baissé du tout. Or les acheteurs reviennent certes sur le marché, mais en faisant des propositions très inférieures aux valeurs des biens échangés, estimant que la baisse globalement, toutes zones confondues, est de l’ordre de -10% à -15%.
A quel taux peut-on emprunter aujourd’hui. Sur une période de 20 ans, par exemple…
Bruno Rouleau – La durée moyenne des crédits, en France, est en réalité plutôt aux alentours de 22 ans. Mais sur 20 ans, selon les barèmes bancaires, on est aujourd’hui aux alentours de 3,90%. Après négociation, on tourne autour de 3,50%.
Contre quel taux, il y a deux ans ? 1% ?
Bruno Rouleau – Il y a deux ans, la situation était très compliquée. La hausse battait son plein. Mais il y a deux ans et demi – septembre 2021, donc-, on était effectivement à moins de 1%. 0,95% même, sur 20 ans. Contre 4,5% il y a quelques mois encore. On constate donc clairement un « apaisement » sur le front des taux. Et une volonté des acquéreurs de revenir sur le marché.
Un conseil, à l’attention d’un investisseur en immobilier locatif ?
Bruno Rouleau – En immobilier locatif, il faut vraiment bien choisir son projet. Bien construire son « aménagement ». Parce que, aujourd’hui, les normes édictées par le HCSF[1] sont encore, malgré tout, très contraignantes. Des solutions existent néanmoins. Comme utiliser la structure d’une société civile immobilière, si votre situation le permet. Bien préparer son projet est en tout cas indispensable pour convaincre les banques, lesquelles ont néanmoins besoin d’investisseurs pour faire fonctionner leur « machine à billets ». Pour elles, l’investisseur est clairement un client potentiel.
Un mot de conclusion, positif…
Bruno Rouleau – Le marché immobilier résidentiel reste un marché drivé par la volonté de devenir propriétaire de son logement. Il répond à un objectif de sécurité, de sécurisation de son patrimoine. Son ajustement, brutal l’an dernier, est en cours. Mais pour mieux repartir…
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A propos de CNCEF Crédit(i)
Créée en janvier 2011, CNCEF CREDIT, association professionnelle agréée par l’ACPR, présidée par Côme Robet est née de la nécessité de partager une vision constructive de l’avenir de la profession de courtier en prêt, de faire mieux connaître ce métier aux professionnels et aux particuliers.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.