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Quelles que soient nos idées politiques et notre fortune, nous sommes tous préoccupés par le niveau de l’impôt. A tel point que, souvent, la première question que se posent les investisseurs, n’est plus de savoir si tel ou tel placement a vraiment une rentabilité économique assurée, elle est de savoir à quel taux les gains sont imposés et si les sommes investies peuvent ou non donner lieu à une déduction du revenu imposable ou à une réduction d’impôt. De ce point de vue, la mise à jour des informations fiscales sur pierrepapier.fr (à voir dans les rubriques consacrées aux SCPI, OPCI, SIIC et SICAV) est révélatrice : la loi de finances pour 2011 comporte un net durcissement de la fiscalité des revenus financiers et des plus-values mobilières ou immobilières.
Cela va-t-il s’arrêter ? La question peut se poser alors que le chef de l’Etat a voulu une réforme de la fiscalité du patrimoine qui devrait être présentée dans la première quinzaine de mai et discutée au Parlement avant l’été. A cette occasion, le bouclier fiscal devrait être supprimé : il a le tort d’être compliqué et impopulaire. Il ne profite qu’à moins de 20.000 personnes et en mécontente des millions… Mais si on le supprime, il paraît difficile de garder l’ISF en l’état. Mais alors se pose deux problèmes.
Le premier est d’ordre politique. Supprimer purement et simplement l’ISF ou l’alléger de façon considérable pose un problème à un an des élections présidentielle et législatives. Dans la majorité, on garde un souvenir douloureux de l’impact sur l’élection présidentielle de 1988 de la suppression de l’impôt sur les grandes fortunes par le gouvernement de Jacques Chirac. Il n’est pas question de recommencer la même opération. Mais, du coup, on peut se demander s’il était bien opportun de prévoir une réforme fiscale d’importance en 2011.
La question se pose avec d’autant plus d’acuité qu’il faut faire face à un second problème : celui du déséquilibre des finances publiques. Depuis plus d’un an, les Etats européens sont sous la surveillance des marchés et le moindre écart est aussitôt sanctionné par une hausse des taux d’intérêt exigés par les investisseurs pour souscrire aux emprunts de l’Etat fautif. On peut penser que les 4 milliards attendus en 2011 de l’ISF sont finalement peu importants face au total des recettes fiscales de l’Etat (254 milliards nets) et aux grandes masses que représentent la TVA (175 milliards), l’impôt sur le revenu (59 milliards) ou l’impôt sur les sociétés (57 milliards). Pourtant, dans le contexte actuel, il est hors de question que l’Etat abandonne purement et simplement ces 4 milliards. Mais où les prendre ? Le chef de l’Etat ne veut pas entendre parler en compensation d’une nouvelle tranche de l’impôt sur le revenu pour les plus gros contribuables et l’idée de l’imposition des plus-values sur la vente de la résidence principale (à partir d’un certain niveau de prix) a été vite abandonnée. Par ailleurs, le chef de l’Etat ne veut pas d’un allègement trop modeste de l’ISF. Alors, que va-t-il se passer ?
Face à tant d’incertitudes, certains spécialistes en finissent par se demander s’il ne vaudrait pas mieux garder l’ISF, quitte à réduire le taux pesant sur les tranches les plus élevées. En fin de compte, font observer les fiscalistes, l’ISF, en dépit de tous ses défauts, n’est pas si idiot que cela. Par exemple, pour la résidence principale, la valeur estimée tient compte de l’endettement de l’acquéreur : on n’est vraiment imposé sur la valeur totale de son bien (avec une décote de 30 %) qu’à partir du moment où on a remboursé la totalité de l’emprunt ayant permis de l’acquérir, alors que pour d’autres impôts, comme la taxe foncière, le législateur ne s’est pas encombré de telles subtilités. Il faut vraiment que la situation soit grave pour que des conseillers fiscaux en arrivent à trouver des vertus à l’ISF !
Gérard Horny