Les plateformes de crowdfunding immobilier peuvent proposer différents types de supports d’investissement. Obligations, mais aussi actions, prêts ou autres comptes courants d’associés, le risque porté par l’investisseur est donc là aussi à géométrie variable. Episode IV – et final – de la saga « crowdfunding immobilier : comprendre comment – et dans quoi – vous investissez¹ »…
Au-delà de l’analyse de la destination des fonds levés (voir « Crowdfunding immobilier, acte I : où sont investis les fonds collectés ? », « Crowdfunding immobilier, acte II : les différents types de projets proposés »), et de celle du statut juridique des opérateurs (voir « Crowdfunding immobilier, acte III : la nature juridique des entités recevant – ou utilisant – les fonds »), il faut également se pencher sur la nature juridique du support de l’investissement en crowdfunding immobilier. Car, d’une plateforme et/ou d’un projet à l’autre, les formules proposées peuvent varier. Obligations, mais aussi actions, prêts ou autres comptes courants d’associés, le risque porté par l’investisseur est donc là aussi à géométrie variable…
Les actions
Il s’agit d’un titre financier qui représente une fraction du capital de l’entreprise qui l’a émise. La plateforme permet ainsi aux investisseurs de souscrire au capital de petites et moyennes entreprises non cotées. Ceux-ci deviennent actionnaires, et donc propriétaires d’une partie des programmes proposés. L’actionnaire n’est pas tenu personnellement responsable si l’entreprise n’est pas capable de régler ses dettes. Dès lors, la valeur maximum que l’actionnaire peut perdre est celle du placement.
Les obligations
Une obligation est un titre financier représentant une part de dette émise par une entreprise, une collectivité territoriale ou un Etat. Elle représente un contrat entre l’émetteur et les détenteurs successifs du titre, ayant comme éléments principaux l’échéancier des flux financiers (montant facial emprunté par l’obligation, modalités de remboursement et de paiement des intérêts) et leur mode de calcul (à taux fixe, à taux variable). Certaines obligations présentent des caractéristiques particulières (convertibles en action, par exemple). Dans le cadre de l’investissement direct auprès de l’émetteur, sans que les investisseurs ne soient regroupés dans une structure spécifique interposée, ces derniers achètent directement des obligations et deviennent donc les créanciers du porteur de projet. Dans le cadre d’un investissement indirect (via une SAS holding, ou « société interposée »), l’investisseur souscrit également des obligations. Mais l’argent ainsi collecté par la structure interposée ne « s’arrête » pas là. Il est ensuite investi en tant que compte courant d’associés d’une SAS, ou d’une SCICV, dédiée au projet financé.
Le compte courant d’associé
Il s’agit d’un compte ouvert au nom d’un associé d’une société, dans les livres comptables de celle-ci, sur lequel figure les sommes laissées ou mises à la disposition de la société par cet associé en sus des parts du capital. Inscrites au passif du bilan, ces sommes peuvent produire des intérêts pour le titulaire (associé investisseur). Un risque lié au rang de séniorité existe donc.
Les prêts
L’investisseur (uniquement une personne physique) prête une somme d’argent au porteur du projet, et sous certaines conditions (taux d’intérêt, durée du prêt, échéance de remboursement du capital restant dû, éventuellement modalités de remboursement anticipé…). Cette somme ne peut excéder 2 000 € par prêteur et par projet. La durée de ces crédits ne peut excéder 7 ans.
Les royalties (ou revenue based finance)
Il s’agit d’une solution alternative à la levée de fonds traditionnelle, souvent considérée commehybride entre le financement par emprunt et le financement par capitaux propres. En effet, le capital de la société en recherche de fonds n’est pas partagé. Les versements dépendent des revenus du projet et sont calculés en pourcentage de ces revenus (chiffre d’affaires ou économies réalisées). Les conditions encadrant le paiement de la redevance sont définies dans un « contrat de cession de revenus futurs » conclu entre le chef d’entreprise et les investisseurs, et qui remplace le pacte d’actionnaire et la cession de titres. La durée de paiement dépend de la capacité du porteur de projet à rembourser les investisseurs de leur capital initialement investi et du pourcentage des revenus prédéfinis dans le « contrat de cession de revenus futurs ». L’investisseur dispose donc d’un droit à une espérance de gain proportionnel à la (non-) réussite du projet. Si le projet réussit, l’investisseur reçoit à échéance définie une part des revenus (royalties) de l’entreprise financée. Attention, le royalty-based crowdfunding n’est assimilé ni à un investissement en capital, ni à un titre financier, ni à un prêt, au sens des codes monétaires et financiers : il n’est actuellement soumis à aucune réglementation financière…
Les parts sociales
Les investisseurs – 50 au maximum – cofinancent un bien immobilier acquis par un véhicule d’investissement – une « SAS de gestion immobilière» -, via la souscription de ses parts sociales. Ils deviennent donc associés d’une société à responsabilité limitée d’acquisition-vente de biens immobiliers. La SAS dédiée met en place des dispositions statutaires conférant à la collectivité des associés le pouvoir de délibérer, avec l’application d’un pourcentage de quorum minimum (a priori de 80% à 50%, suivant les types de décisions, structurantes ou non). Ainsi, les associés investisseurs assurent de la gestion locative de biens immobiliers (voir « Le crowdinvesting, un nouveau défi pour la pierre-papier? »)
En résumé, même si les offres en crowdfunding immobilier sont aujourd’hui très majoritairement construites autour des émissions d’obligations (avec ou sans société interposée), les possibilités offertes par les différents supports pouvant être proposés à la souscription, ajoutées à celles des différentes natures juridiques autorisées pour les entités recevant les fonds, peuvent faire naître un grand nombre de montages financiers spécifiques. A cette relative complexité, le crowdfunding immobilier ajoute, à l’instar de tout autre placement financier, des risques spécifiques liés aux supports de l’investissement. Il est donc encore plus impératif de bien vérifier que le placement proposé soit bien adapté à l’investisseur, et que celui-ci en a bien saisi la nature et le risque associé.
Céline Mahinc
[1] Comprendre comment – et dans quoi – vous investissez. Pas d’autres informations ici ?