Rémy Bourgeon, le président d’Alderan, explique pourquoi les SCPI internationalisent de plus en plus systématiquement leurs investissements. Pas forcément que pour de bonnes raisons… Il livre aussi son analyse du marché actuel -et futur- des gestionnaires d’actifs immobiliers. Interview.
Les SCPI sont de plus en plus tournées vers l’international. C’est le cas des vôtres, mais cette tendance s’observe sur l’ensemble du marché. Bien que ce mouvement ait débuté il y a plusieurs années, il s’est fortement accéléré récemment. Pourquoi assiste-t-on aujourd’hui à une recherche accrue d’actifs hors de France ? Cela traduit-il une évolution naturelle du secteur ? Ou bien cela révèle-t-il une perte d’attractivité et de rentabilité du marché français ?
Rémy Bourgeon – Ces facteurs sont tous pertinents. L’internationalisation représente une véritable orientation stratégique, et il est compréhensible que la majorité des acteurs cherchent à se développer en Europe. Il existe également certaines contraintes, notamment liées aux méthodes d’acquisition. Cependant, diversifier géographiquement permet de mutualiser les risques locatifs et de s’exposer à des marchés à des stades de maturité différents, afin de capter les meilleures opportunités disponibles.
Cela constitue donc une raison légitime. Et stratégique ?
Rémy Bourgeon – C’est une raison majeure, mais ce n’est pas la seule. Un autre facteur déterminant réside dans la fiscalité applicable aux revenus fonciers en France. Lorsqu’un investisseur perçoit des loyers provenant de l’étranger, il est automatiquement exempté de la CSG et de la CRDS, ce qui représente un gain immédiat de 17,2 %. Il s’agit donc d’un avantage fiscal significatif pour les souscripteurs.
Serait-ce alors la principale motivation des SCPI qui se lancent aujourd’hui à l’international ? On observe en effet que les nouvelles SCPI adoptent systématiquement un positionnement européen, voire extranational.
Rémy Bourgeon – Non, ce n’est pas la seule motivation. Investir dans l’immobilier ne doit jamais se faire uniquement pour des raisons fiscales – c’est une leçon que j’ai apprise en quarante ans d’expérience dans ce secteur-. Toutefois, bénéficier d’une fiscalité plus avantageuse constitue indéniablement un atout non négligeable.
Pensez-vous que des réformes pourraient être mises en place en France afin d’atténuer ce désavantage fiscal ?
Rémy Bourgeon – Chaque fois que j’échange avec des élus, je leur fais part de mon incompréhension face à la fiscalité qui pénalise lourdement l’investissement immobilier en France. Cette situation explique en grande partie pourquoi l’épargne française s’oriente de plus en plus vers l’Europe. Contrairement aux investissements industriels, qui bénéficient d’une fiscalité plafonnée à 30 % grâce à la flat tax, les revenus issus des SCPI françaises sont soumis au régime des revenus fonciers. Pour un contribuable par exemple imposé à 35 %, il faut ajouter les 17,2 % de prélèvements sociaux. Ce qui porte l’imposition totale à plus de 50 %. Cette distorsion de traitement fiscal entre l’investissement immobilier et l’investissement industriel mérite d’être corrigée.
Restons sur la question des marchés immobiliers étrangers. Nous avons évoqué leur attractivité, mais quels sont, selon vous, les marchés les plus porteurs pour les mois et années à venir ? Nous avons parlé du Royaume-Uni, des pays anglo-saxons en général, et du sud de l’Europe. Y a-t-il d’autres zones géographiques à surveiller, notamment en raison de leur contexte géopolitique ?
Rémy Bourgeon – Il est primordial d’éviter les pays présentant des risques géostratégiques. Nous ne pouvons pas exposer l’épargnant français à des incertitudes excessives. Il est donc impératif d’adopter une approche prudente et ciblée. Par conséquent, nous nous concentrons sur des marchés bénéficiant d’un cadre juridique stable, à savoir principalement le monde occidental et le Commonwealth – notamment l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Ces régions garantissent l’application rigoureuse du droit, assurant ainsi des transactions transparentes et sécurisées. Dans notre métier de gestion de l’épargne, nous devons impérativement nous prémunir contre les risques de blanchiment, de financement du terrorisme et garantir le retour des investissements en France afin de servir les revenus de nos souscripteurs. Il est donc essentiel de se positionner exclusivement sur des marchés présentant une sécurité juridique suffisante.
Tout en disposant d’une implantation locale, ce qui constitue l’un de vos axes stratégiques…
Rémy Bourgeon – Absolument, et je tiens à saluer ici les performances de mon équipe. Investir à l’étranger exige une grande réactivité et une expertise éprouvée. Il est indispensable de s’appuyer sur des équipes agiles et capables de piloter les opérateurs locaux, que nous sélectionnons rigoureusement. Nous bénéficions d’un solide savoir-faire, notamment grâce à l’expérience accumulée par nos collaborateurs issus du secteur immobilier, qui constitue le socle des SCPI. Cette expertise nous confère un avantage compétitif indéniable.
Une dernière question avant de conclure. En 2024, le marché des SCPI a vu l’émergence de nouveaux acteurs tandis que certains gestionnaires historiques ont connu des difficultés, voire un retrait du marché. Comment envisagez-vous l’avenir de ce secteur ? Doit-on s’attendre à des restructurations et des rapprochements ? Le coût d’entrée sur ce marché ne vous semble-t-il pas trop faible ? Enfin, comment Alderan compte-t-elle se positionner dans ce contexte en mutation ?
Rémy Bourgeon – À ce jour, les fusions-acquisitions entre sociétés de gestion restent rares. Cela s’explique par le fait que les acteurs les plus importants sont difficilement accessibles, tandis que les plus récents enregistrent souvent les meilleures performances. Il n’existe donc pas de nécessité immédiate de consolidation. Cependant, des rapprochements stratégiques sont envisageables entre des sociétés de gestion comme la nôtre, qui disposent d’une forte capacité de collecte, et d’autres structures possédant d’importants encours sous gestion mais une collecte plus modérée. Une synergie entre les compétences en collecte et en gestion pourrait alors être envisagée, optimisant ainsi la rentabilité et l’efficacité des opérations.
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A propos d’Alderan(i)
Alderan est une société de gestion créée en 2015 par Rémy Bourgeon. Elle est issue d’un family office immobilier, Ojirel, spécialisé depuis 20 ans en immobilier professionnel, et en particulier dans le secteur des locaux d’activités et la logistique. Alderan agit de manière indépendante sur l’ensemble du cycle de détention : acquisition, gestion et revente. Sa connaissance du marché et son réseau d’apporteurs d’affaires permettent à Alderan d’avoir accès à des opérations exclusives et « off market ».
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.