La collecte nette des SCPI a subi un recul d’environ 20% en 2018. Selon un modèle prédictif élaboré par l’IEIF, elle pourrait de nouveau diminuer dans les mêmes proportions en 2019. Plusieurs sociétés de gestion d’actifs immobiliers constatent cependant un rebond des souscriptions depuis le début de l’année.
La collecte nette des SCPI, on le sait, s’est globalement tassée en 2018, avec un recul d’un peu plus de 19% pour les seules SCPI d’entreprise (5 Md€ environ, contre 6,1 Md€ en 2017). Plusieurs explications ont été avancées : inquiétudes des épargnants face aux projets d’alourdissement de la fiscalité immobilière, perceptibles dès la fin 2017 ; prudence des compagnies d’assurance-vie, vis-à-vis de leur niveau d’exposition aux actifs immobiliers ; prudence, encore, et professionnalisme d’une partie des sociétés de gestion d’actifs immobiliers, soucieuses d’ajuster niveau de collecte et capacité d’investissement.
Variables économiques et niveau de collecte
Sans remettre en cause ces facteurs explicatifs, l’IEIF s’est penché sur les liens qui pouvaient exister entre certaines variables économiques et le niveau de collecte des SCPI. L’Institut a ainsi identifié trois indicateurs dont les variations sont assez fortement corrélées à l’évolution des souscriptions. Le premier est le niveau des prix de l’immobilier. «Intuitivement, il paraît logique que les investisseurs individuels soient sensibles au risque du marché immobilier. S’ils anticipent une hausse, ou la constatent, ils vont être plus enclins à investir que l’inverse », expliquait ainsi Pierre Schoeffler, senior advisor à l’IEIF, lors d’une réunion organisée par l’Institut cette semaine. Et, effectivement, le coefficient de corrélation entre variations de la collecte et variations de l’indice EDHEC IEIF SCPI est de 53%…
Un taux de corrélation de 75%
Deuxième indicateur : le rendement de l’immobilier ou, plus exactement, sa prime de risque, mesurée par l’écart entre le rendement des SCPI et celui des placements obligataires sans risque. Selon l’IEIF, la corrélation entre cette prime de risque – qui demeure à un niveau historiquement élevé – et la collecte des SCPI serait de 40%. Enfin, troisième facteur: la croissance annuelle du PIB en volume, « qui va de pair avec celle du revenu disponible des ménages, et donc de l’épargne », explique l’IEIF. Son taux de corrélation avec la collecte des SCPI n’est toutefois que de 31%. En associant ces trois indicateurs – selon des modalités non détaillées -, pris en compte sur une période de près de 30 ans (1990-2018), l’Institut propose ainsi un modèle de régression qui explique, à 75%, la progression constatée de la collecte des SCPI.
Estimation 2019 : -20%
En prenant des hypothèses « conservatrices » sur l’évolution attendue en 2019 des indicateurs économiques de corrélation (croissance du PIB à 1,3% vs 1,5% en 2018, taux inchangé des OAT à 10 ans – 0,7% -, rendement des SCPI à 4,3%, variation nulle des prix de l’immobilier), le modèle IEIF « prédit » alors une nouvelle évolution négative de la collecte des SCPI cette année, de l’ordre de -20%. « Ce n’est qu’une modélisation, prévient Pierre Schoeffler, avec une incertitude de l’ordre de 8%, soit 320 M€ ». Si l’estimation s’avérait exacte, la collecte 2019 reviendrait alors au niveau de 2015, soit environ 4 Md€. Ce que le senior advisor de l’IEIF considère comme parfaitement cohérent. « Les collectes 2016 et 2017 étaient exceptionnelles, car elles peuvent s’expliquer en très grande partie par les effets de la politique monétaire accommodante de la BCE. Fin 2015, les taux d’intérêt étaient quasiment nuls. Un « effet d’aubaine » s’est exprimé pendant deux ans. Il ne devrait pas s’exprimer plus longtemps », estime ainsi Pierre Schoeffler.
Un contexte toujours favorable à la collecte
Si les flux adressés aux SCPI ne bénéficient plus – ou moins – d’un contexte monétaire d’ailleurs toujours favorable, d’autres moteurs, listés par l’IEIF dans une étude parue cette semaine¹, restent toujours aussi actifs : incertitudes sur les retraites, rendements relatifs plus élevés de l’immobilier, statut de protection contre l’inflation, hausse des valeurs locatives dans certaines zones, effet Brexit, effet Grand Paris… D’ailleurs, plusieurs sociétés de gestion – et notamment Perial AM, dont le président, Eric Cosserat, s’exprimait aussi jeudi dernier à la réunion de l’IEIF -, observent un retour en force du niveau des souscriptions depuis le début de l’année. Alors, quel niveau de collecte pour les SCPI en 2019 ? La réponse en fin d’année…
Frédéric Tixier
A propos de l’IEIF
Créé en 1986, l’Institut de l’Epargne Immobilière et Foncière est un centre d’études, de prospective et de recherche appliquée indépendant qui met à disposition des décideurs immobiliers des outils de veille, d’analyse et de prévision. Il regroupe 115 sociétés : investisseurs institutionnels, foncières cotées, gestionnaires d’actifs, promoteurs, banques, commercialisateurs… Il a pour vocation d’être un incubateur d’idées pour la profession et un cercle de réflexion des professionnels de l’immobilier et de la finance. L’activité de l’IEIF s’articule autour de trois pôles : Les marchés immobiliers (Tertiaire, Commerce et Logement), les fonds immobiliers cotés (SIIC-REITs) et non cotés (SCPI-OPCI) et le Club Analyse et Prévision.
[1] « Analyse de l’année 2018 des SCPI : quel modèle pour les SCPI ? » – IEIF – Avril 2019.