Immovalor Gestion, gestionnaire de SCPI et de SCI, pèse 4,5 Md€. Jean-Pierre Quatrhomme, son président, invité de l’émission « Les acteurs de la pierre papier » détaille les stratégies de ses différents véhicules -notamment de la SCPI Allianz Pierre -, et revient sur les évolutions réglementaires qui ont impacté la gestion et la distribution des SCPI ces derniers mois.
Première question, traditionnelle : qui est Immovalor Gestion, que gère-t-elle, combien gère-t-elle ?…
Jean-Pierre Quatrhomme – Immovalor Gestion est une société de gestion de portefeuille détenue à 100% par Allianz. Nous gérons des SCPI pour le compte de 27 000 associés, ainsi que deux SCI objets de supports pour des contrats en unité de compte, et une SCI dédiée aux actifs cantonnés de l’assureur. Mais également des OPCI, dont un OPCI de résidences seniors que nous venons de lancer. Au total, Immovalor Gestion gère un encours d’environ 4,5 Md€.
Allianz Pierre est l’une des plus anciennes SCPI du marché. Mais elle fait néanmoins partie de la trentaine de SCPI qui l’an dernier ont amélioré leur taux de distribution. Et vient, au 1er trimestre 2019, d’augmenter une nouvelle fois son dividende. Comment expliquer cette amélioration de la rentabilité d’Allianz Pierre ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Allianz Pierre est une SCPI de bureaux dont la capitalisation est de l’ordre de 1,1 Md€. En 2018, nous avons poursuivi une politique d’arbitrage active, en particulier sur les immeubles qui ne correspondaient plus aux attentes du marché, ou qui étaient vacants, ce qui nous a permis d’améliorer nos taux d’occupation et nos revenus locatifs. Dans le même temps, nous avons continué à réaliser d’importants travaux, et avons livré un très bel immeuble à Boulogne dans le courant de l’année 2018, maintenant intégralement loué. Enfin, nous nous attachons à maintenir une politique d’investissement qui soit la plus proche possible de la collecte, de façon à éviter de supporter des poches de trésorerie dont on sait qu’elles ne sont pas rentables aujourd’hui.
Allianz Pierre est très positionnée sur Paris et la région parisienne, où elle a réalisé, historiquement, ses premiers investissements. Mais le prix de souscription de la SCPI est aujourd’hui décoté. Depuis quand la part n’a-t-elle pas été réévaluée ?
Jean-Pierre Quatrhomme – La part a été réévaluée il y a un an, l’augmentation suivait d’ailleurs l’évolution du prix de souscription réalisée en 2016. Aujourd’hui, le prix de souscription est plus proche de la valeur de reconstitution. Mais vous avez raison d’insister sur la spécificité du patrimoine d’Allianz, qui est positionnée essentiellement sur Paris et l’Ile-de-France, à hauteur d’à-peu-près 80%.
Les statistiques ASPIM-IEIF sont sorties le 22 mai, montrent que la collecte des SCPI a fortement rebondi au 1er trimestre (à 2,1 Md€, soit +79%). Allianz Pierre est-elle dans cette tendance ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Exactement. A fin avril, on a constaté une progression des souscriptions de l’ordre de 58%. Je pense que cette tendance s’inscrit dans la volonté des investisseurs de protéger leurs actifs, en particulier suite aux turbulences des marchés que nous avons connues fin 2018. Et également parce que la remontée des taux d’intérêt semble être un phénomène qui s’éloigne et qui a donc tendance à convaincre de la qualité de l’investissement dans la pierre.
Si les SCPI d’entreprise ont le vent en poupe, ce n’est pas le cas des SCPI fiscales. Immovalor Gestion en gère une petite dizaine, mais n’a procédé à aucun lancement depuis plus de deuxans. Pourquoi ?
Jean-Pierre Quatrhomme – On a effectivement une expérience traditionnelle en matière de SCPI résidentielles. Nous venons d’ailleurs de finaliser la liquidation d’une SCPI Besson qui a donné un taux de rendement plutôt intéressant (de l’ordre de 5,5%). Mais nous constatons, depuis le dernier lancement de notre SCPI Pinel, une moindre appétence des investisseurs pour ce type de produit. Pour exemple, sur cette dernière SCPI nous avons collecté environ 25 M€, contre 200 M€ lors d’un précédent lancement sur une SCPI Scellier… Je pense que c’est la nature du produit, soumis à des durées fixes (de l’ordre de 9 ans), qui n’est peut-être pas tout à fait adapté à l’horizon d’investissement résidentiel…
On voit d’ailleurs de plus en plus de SCPI logement se positionner dans la catégorie SCPI d’entreprise, et avec un certain succès en termes de collecte…
Jean-Pierre Quatrhomme – Effectivement, car elles ont cette capacité à avoir une duration beaucoup plus longue que les SCPI fiscales….
Autre particularité, que vous avez évoquée, Immovalor Gestion gère des SCI. Quels sont leurs avantages ? Et pourquoi des SCI plutôt que des OPCI, sachant que leur finalité est également de servir de supports aux contrats d’assurance-vie ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Les SCI nous donnent une plus grande souplesse en termes d’univers de gestion. Nous pouvons nous intéresser à des actifs détenus en direct, ou de façon indirecte, voire investir sur des sociétés immobilières cotées ou des sicav immobilières. Dans une SCI, il n’y a pas la contrainte de liquidité propre aux OPCI. Cela nous permet de nous positionner, en termes de performance, plutôt dans les premiers rangs du marché, devant les OPCI…
Les OPCI ont affiché une performance moyenne, l’an dernier, de 0,8%. Vos SCI ont fait mieux ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Oui, si l’on prend par exemple SCI Allianz Pierre, la plus importante en termes de capitalisation,sa performance est de 3,19% sur 2018, et supérieure à 12,5% sur 3 ans.
Passons aux évolutions réglementaires, qui ont impacté le monde des SCPI ces derniers mois. La révision du règlement général de l’AMF, la loi Pacte : toutes ces mesures vont-elles dans le bon sens ? Quid notamment de la fin des bulletins trimestriels ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Il y a eu effectivement un grand foisonnement réglementaire, car il faudrait ajouter PRIPS, qui a renforcé les obligations d’information des souscripteurs, et MIF2, qui oblige les distributeurs à donner des informations sur les frais de souscription et de gestion sur un rythme annuel. La loi PACTE prévoyait quant à elle un élargissement des domaines d’intervention des SCPI, en particulier en leur permettant d’avoir une quote-part de biens meubles dans leur patrimoine, d’investir dans des SCI de SCI, voire dans des sociétés commerciales. Malheureusement, le Conseil constitutionnel n’a pour l’instant pas retenu ces dispositions. Essentiellement pour des raisons techniques, car il a considéré que ces mesures n’avaient pas de correspondances avec le texte d’origine. Il faut espérer qu’un prochain texte permettra de les faire adopter. Enfin, le règlement de l’AMF, quant à lui, contient des dispositions qui sont intéressantes, en particulier sur la partie dématérialisation. Sur le sujet des bulletins trimestriels, les sociétés de gestion peuvent maintenant recourir au mécanisme de la dématérialisation, et passer à un rythme de production semestriel.
C’est ce que vous allez mettre en place, chez Immovalor Gestion ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Nous restons attachés à une information assez régulière des associés, donc nous garderons la périodicité trimestrielle des bulletins d’information. Mais probablement en utilisant, pour certains bulletins, la capacité de dématérialisation, tout en gardant l’envoi physique aux associés au moins deux fois par an.
Ces textes prévoient à la fois la dématérialisation de l’information, ce qui est plutôt une bonne chose, mais également une modification du contenu de l’information obligatoire. Certaines sociétés de gestion ont fait le choix de conserver un bulletin de nature trimestrielle, en termes de contenu, une fois tous les six mois, et de produire, pour les autres publications, des bulletins « allégés ». Chez Immovalor Gestion, ce sera bien le même contenu, chaque trimestre ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Exactement, nous conserverons le même niveau d’information.
Toujours sur le sujet de la dématérialisation, la modification du règlement général de l’AMF facilite la souscription en ligne. Où en est Immovalor Gestion sur ce sujet ?
Jean-Pierre Quatrhomme – C’est un chantier qui nous intéresse et nous occupe beaucoup… Nous travaillons à un mécanisme de dématérialisation avec la possibilité de gérer différents types d’accès, sachant que nous sommes en relation avec de multiples réseaux (le réseau salarié d’Allianz, plusieurs réseaux de CGPI…) tout en acceptant les souscriptions en direct. Il faut donc prévoir un système dématérialisé qui permet d’accueillir ces différents canaux de distribution. Nous voulons également y inclure la possibilité, pour les associés, de souscrire à crédit. C’est un chantier qui devrait pouvoir aboutir dans le courant de l’année 2020.
Pour finir, j’aimeraisrevenir sur le sujet finalement principal, celui du sous-jacent… Quel est votre sentiment aujourd’hui sur les marchés de l’immobilier d’entreprise ou du résidentiel ? Sont-ils en surchauffe ? Le risque d’un retournement est-il à exclure ?
Jean-Pierre Quatrhomme – C’est évidemment une grande question. Comme je le soulignais tout à l’heure, la perspective d’une remontée des taux s’est « apaisée ». Nous pourrions donc à nouveau connaître une période de stabilité dans ce domaine. Par ailleurs, il est clair qu’aujourd’hui, même si nous avons vécu une pression sur les rendements, notamment des actifs tertiaires, le différentiel entre les OAT long terme et le rendement de l’immobilier reste extrêmement favorable à cette classe d’actifs. La situation est assez comparable pour le résidentiel, même si également, dans ce secteur, on assiste à une forte compression des taux de rendement. Nous restons convaincus que ces deux classes d’actifs présentent de belles perspectives sur le long terme.
Mais où investir actuellement ? Allianz Pierre, par exemple, est essentiellement francilienne, mais surtout essentiellement française. Or la tendance, aujourd’hui, est d’aller chercher des rendements hors de France, en Europe notamment. Cette diversification internationale fait-elle partie des objectifs d’Immovalor Gestion ?
Jean-Pierre Quatrhomme – Pour Allianz Pierre, non. Nous restons très franco-français, en maintenant une politique d’investissement équilibrée à la fois sur la région parisienne (la SCPI vient d’ailleurs de co-investir, avec l’une de nos SCI, dans un immeuble à Châtillon) et sur les régions avec notamment l’acquisition, l’an dernier, d’un immeuble sur Lille.
Frédéric Tixier
A propos d’Immovalor Gestion(i)
Créée en 1983, Immovalor Gestion est une société de gestion de portefeuille agréée par l’Autorité des marchés financiers, qui gère des SCPI pour le compte de 27 000 associés. C’est une filiale à 100% du Groupe Allianz. Elle gère actuellement 4,6 milliards d’euros actifs (valeur brute estimée au 31/12/2017) représentant 2156 appartements résidentiels et 700 000 m2d’immobilier d’entreprise au travers de : 1 SCPI de bureaux, 8 SCPI fiscales, 2 SCI (sociétés civiles immobilières – unités de compte), 5 OPPCI (organismes professionnels de placement collectif immobilier).
(i) Cette information est extraite d’un document officiel de la société