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Entretien avec André Camo, président du groupe Primonial
Vous venez de créer Primonial REIM, société de gestion de SCPI, que vous présidez, avec, à vos côtés, Grégory Frapet, directeur général. La société a obtenu son agrément le 8 avril. La commercialisation de vos propres SCPI devrait commencer prochainement. Comment s’articule cette nouvelle activité avec votre activité de distributeur de SCPI gérées par d’autres ?
Lorsque Grégory Frapet et moi-même sommes arrivés dans cette entreprise, en 2007, notre première tâche a été de structurer une gamme de produits collectifs. Nous connaissions bien le marché, nous avions notamment l’idée de nous spécialiser sur les locaux commerciaux et les murs de magasins et de diffuser largement ces produits en direction des grands investisseurs institutionnels et des conseillers en gestion de patrimoine indépendants. Nous avons donc sélectionné des SCPI existantes ou demandé à des sociétés de gestion de concevoir, sur la base d’un cahier des charges précis, de nouvelles SCPI.
C’est ainsi, par exemple, que nous distribuons Primopierre, véhicule d’investissement dans l’immobilier de bureaux , géré par BNP Paribas REIM. Nous avons procédé de la même façon pour la SCPI Scellier Primo 1 gérée par Uffi REAM.
Au total, nous avons distribué pour 230 millions d’euros de parts de SCPI l’an passé, avec un positionnement assez original : nous analysons les SCPI de la place, nous sélectionnons les produits qui nous semblent correspondre aux besoins des épargnants et, quand nous pensons qu’ils n’existent pas, nous en suscitons la création. De plus, la distribution par des conseillers en gestion de patrimoine indépendants a permis le rajeunissement de la clientèle.
Quand nous avons eu la conviction que nous étions capables non seulement de concevoir nos propres produits, mais aussi de les gérer, nous avons pensé qu’il était temps de créer une société de gestion. Mais, évidemment, nous continuerons à distribuer les SCPI d’autres sociétés de gestion. Les deux activités se complètent, elles ne s’excluent pas.
Dans un premier temps, nous comptons lancer une SCPI Scellier, dont la procédure de visa est en cours à l’AMF. Ensuite nous lancerons une SCPI de rendement. Notre objectif est d’atteindre un milliard d’euros d’actifs sous gestion à l’horizon 2014. Cet objectif est réaliste, je dirais même qu’il est prudent : 250 millions par an pendant quatre ans, c’est tout à fait réalisable. Regardez les chiffres de collecte actuels : ils sont impressionnants.
Vous pensez donc que ce succès des SCPI est appelé à s’inscrire dans la durée ?
Au cours des deux dernières années, les SCPI ont montré leur résistance face aux aléas de la conjoncture. Les sociétés de gestion ont pu maintenir le niveau de revenus distribués, malgré les renégociations de loyers, grâce à la mobilisation des reports à nouveau. Et que constate-t-on aujourd’hui ? Les loyers recommencent à progresser, les renégociations sont terminées et les mesures d’accompagnement, telles que les franchises de loyer, sont derrière nous. L’an dernier, les valeurs des parts de SCPI ont progressé. C’est d’ailleurs ce qui explique que les rendements ont un peu baissé, car les revenus distribués sont restés stables.
Le succès des SCPI est d’autant plus remarquable que la dynamique de commercialisation est assez molle : les réseaux bancaires ne se mobilisent guère que dans le cadre de campagnes pour les SCPI fiscales. Mais il s’explique parfaitement : qu’ont à leur disposition les retraités qui veulent disposer de revenus réguliers, en dehors des SCPI ? On voit bien que l’immobilier doit être au cœur d’une logique patrimoniale. Et les épargnants ont bien compris que les SCPI sont un produit immobilier, pas un produit financier. C’est la raison pour laquelle les SCPI ont bien résisté à l’arrivée des OPCI. Les épargnants voient bien que, sur longue période, les rendements restent entre 5 % et 6 % et que l’évolution de la valeur des parts est positive. Les soucis de gestion, les relations avec les locataires restent au niveau du gérant. L’information est régulière, il y a les assemblées générales. La gestion est claire.
Mais les SCPI ne risquent-elles pas d’être victimes de leur succès, avec des difficultés à investir les capitaux collectés?
C’est un faux problème. Les SCPI peuvent entrer en concurrence avec des investisseurs privés mais, d’une façon générale, leurs achats se situent à un niveau supérieur et, par ailleurs, ils sont très loin en dessous de ceux des gros investisseurs institutionnels. Pour que les SCPI rencontrent des problèmes d’investissement, il faudrait que les sommes collectées atteignent un niveau sans aucun rapport avec celui qui est atteint actuellement.
Leur succès ne dépend-il pas trop de mesures fiscales, qui peuvent ne pas être reconduites, compte tenu des difficultés budgétaires ?
Chaque fois que des mesures fiscales sont adoptées en faveur du logement, on vit dans la peur de leur disparition… Et d’autres viennent prendre le relais. Il faut bien voir que les grands institutionnels ont déserté le secteur de l’immobilier résidentiel. Face aux besoins en logements, les pouvoirs publics ont tout intérêt à maintenir des dispositifs du type Scellier. L’effort de construction est orienté vers les endroits où la demande locative est forte et le plafonnement des loyers répond bien à un besoin social. D’ailleurs, il n’a pas été assez souligné que le plafond des loyers a été abaissé, alors que cela permet la construction de logements à caractère social qui ne sont pas pour autant classés comme logements sociaux. En résumé, nous estimons que ce dispositif est à la fois efficace et vertueux. Mais, comme je vous l’ai dit, cela ne nous empêche pas de réfléchir aussi à d’autres types de SCPI, pour que Primonial REIM gagne en originalité et en efficacité.
Propos recueillis par Gérard Horny