Michel Varaldo, responsable de l’équipe des analystes financiers suivant les foncières européennes à la Société Générale, répond aux questions de Christophe Tricaud.
Pierrepapier.fr : Après leur nette surperformance en 2014, les foncières amplifient leur avance depuis le début de l’année avec un gain de 14 % pour l’indice IEIF REIT Europe. Comment jugez-vous cet attrait des foncières ?
Michel Varaldo : La plus grande partie de la surperformance des foncières en Bourse est à mettre sur le compte de l’évolution à la baisse des taux d’intérêt. La faiblesse des taux d’intérêt diminue le coût du capital et favorise d’autant leur valorisation. La politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) et son « Quantitative Easing » va accentuer la faiblesse des taux d’intérêt et alimenter le flux de liquidités qui cherchent à s’investir dans des actifs offrant un rendement élevé. Or, même après leur fort mouvement de hausse, les Sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC) et leurs homologues européennes présentent encore un rendement réel supérieur de 100 points de base (1 %) à leur moyenne des dix dernières années. Le potentiel de hausse n’est donc pas épuisé. D’autant que la baisse des taux d’intérêt si elle apparaît comme le principal moteur de la hausse des cours de bourse des foncières n’est pas le seul facteur de la hausse de ces sociétés créatrices de valeur.
Quel est votre scénario économique dans lequel s’insèrent vos prévisions pour le secteur immobilier ?
Le contexte des prochains mois devrait se caractériser, selon nos économistes, par des taux d’intérêt bas et une croissance économique faible. Le vrai risque c’est la déflation qui produit des effets négatifs sur les loyers et les valorisations. Mais ce n’est pas notre scénario central.
Qui achète les foncières en Bourse ?
On note actuellement un intérêt pour le secteur immobilier en Bourse qui dépasse celui des acteurs traditionnellement investis sur le secteur. On observe un courant acheteur émanant de fonds généralistes qui viennent chercher un rendement supérieur à celui des autres actions de la cote européenne. Ce n’est peut-être pas sans danger, mais à court terme cela soutient les cours de Bourse.
Quelles sont vos valeurs, secteurs et pays de prédilections en ce début d’année ?
Nous privilégions le secteur résidentiel allemand qui compte aujourd’hui deux des dix plus grosses capitalisations boursières au sein du compartiment des sociétés foncières européennes. Elles bénéficient d’une évolution à la hausse des loyers alors que les prix d’acquisitions restent beaucoup plus bas que dans le reste de l’Europe et de la France en particulier. La taille qu’ont acquise ces sociétés s’accompagne d’une réelle industrialisation de la gestion de leur parc résidentiel. La fusion en cours de Deutsche Annington Immobilien avec Gagfah va accroître son portefeuille de quelques 140 000 logements pour le porter à 350 000 unités. Pour mémoire lorsque Simco était leader en France dans ce domaine son portefeuille se limitait à près de 30 000 logements… Ensuite nous préférons LEG Immobilien spécialisée dans la détention et la gestion d’actifs immobiliers résidentiels situés dans la Rhénanie du Nord-Westphalie en Allemagne compte 95 342 actifs répartis entre logements (94 311) et commerces. Enfin Deutsche Wohnen est également intéressante quoi que sa forte présence sur l’agglomération berlinoise peut laisser place à des craintes sur un encadrement des loyers.
L’exposition aux commerces reste envisageable avec Unibail Rodamco pour la qualité incontestée de ses actifs, Mercialys pour ses loyers en retard sur le marché, Klepierre qui après sa fusion avec Corio prend une place de choix dans les grands indices du secteur et Hammerson pour avoir une exposition aux centres commerciaux anglais et bénéficier du pipeline de développement et de la participation de 40% dans Value Retail (La Vallée Village…).
Nous sommes plus réservés sur les bureaux dans un contexte où le taux de chômage ne s’améliore pas. Mais la foncière italienne Beni Stabili, filiale à 48 % de Foncière des Régions, dont le patrimoine d’actifs est essentiellement implanté à Rome et à Milan paraît bien placée pour tirer parti des opportunités nées de l’évolution favorable du statut des SIIQ (équivalent italien du statut SIIC) qui pourrait se révéler le meilleur statut de transparence fiscal en Europe. Elle présente un fort potentiel d’appréciation de ses loyers sur le long terme.
Propos recueillis par Christophe Tricaud
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