Après les exemples allemands, bataves et britanniques, la Bourse de Paris renoue avec les foncières de logement. Powerhouse Habitat, qui possède 7140 logements rachetés à EDF en 2000, veut porter son patrimoine à 20 000 unités.
Ce devrait être la société Powerhouse Habitat qui ouvrira le bal du grand retour des foncières de logement à la Bourse de Paris. La foncière a déposé son prospectus d’introduction en Bourse auprès de l’AMF et devrait normalement se faire coter d’ici quelques semaines.
Powerhouse Habitat s’est constitué, à l’occasion du rachat de 7140 logements, d’agents et de cadres de l’électricien, souvent construits près des centrales nucléaires, que lui a vendus EDF en 2000. A l’origine de la transaction, Deutsche Bank et LBO France l’on ensuite revendu en 2013 à TwentyTwo Real Estate.
Aujourd’hui, son président Daniel Rigny, un ancien partenaire de Perella Weinberg, indique au Figaro : « Powerhouse veut aller en Bourse pour lever des capitaux et assurer la croissance. Nous voulons racheter des portefeuilles de logements en région pour qu’à l’horizon 2018 notre parc se monte à 20 000 unités« . Avec cette introduction en Bourse, la société espère lever 370 millions d’euros. La nouvelle recrue de la Bourse devrait adopter le régime des sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC) de transparence fiscale. Les logements de Powerhouse sont loués aujourd’hui entre 8 et 12 euros le mètre carré contre 6 euros pour les HLM. Ils procurent globalement 70 millions d’euros de loyers. En 2014, la société a dégagé un résultat opérationnel de 46 millions d’euros.
Ce ne serait donc pas la réédition de la cotation du portefeuille de la sidérurgie lorraine au début des années 90, quand Batibail s’est introduite en Bourse. Celle-ci avait entamé une mutation en cédant ses logements pour devenir une foncière d’actifs tertiaire.
La Bourse française a tardé à accueillir le retour des foncières de logement. Un courant d’introduction de foncières résidentielles est apparu en Allemagne il y a près de cinq ans. Et aujourd’hui, deux des plus grosses foncières allemandes figurent dans le top five des plus grandes foncières européennes. Plus récemment, il y a un an, c’est aux Pays-Bas que des privatisations ont mené en Bourse des acteurs du secteur résidentiel. Et à la Bourse de Londres, Mill Residential Reit est devenu il y a peu la première foncière de logement cotée du Royaume-Uni.
Le retour en Bourse des foncières résidentielles est soutenu par la demande des institutionnels qui reviennent sur cette classe d’actifs après s’en être détournés depuis la fin des années 80. A l’époque, ils ne prêtaient comme vertu au logement, par nature peu rentable dans l’Hexagone, que sa fonction de rempart contre l’inflation. Et comme cette menace s’éloignait, ils ont réduit leur exposition à ce secteur.
Aujourd’hui, la donne est différente. Dans le contexte de taux très bas, où les obligations d’Etat à 10 ans rapportent moins de 1 %, les institutionnels sont à la recherche des dernières poches de rendement. A cet égard, le logement intermédiaire, certes moins rentable que les actifs tertiaires, offre maintenant une prime de risque non négligeable par rapport aux OAT, alors même que le couple risque/rendement du logement apparaît séduisant. Le secteur résidentiel est en effet soutenu par la démographie et l’urbanisation qui assure un taux de vacance faible, au moins dans les grandes agglomérations.
Les institutionnels privilégient le logement intermédiaire qui a bénéficié des dispositions de la loi de finance pour 2014. Comme le soulignait récemment dans une tribune Vincent Mahé, secrétaire général du groupe SNI : « avec une TVA à taux réduit et une exonération de taxe foncière, le logement intermédiaire retrouve une rentabilité locative nette de 3,5 à 4 % (à comparer à la performance de 2,8 % constatée par IPD en 2014 pour l’ensemble du secteur) ».
Plusieurs fonds institutionnels investis dans le logement intermédiaire ont déjà vu le jour au cours des derniers mois, après que la Caisse des Dépôts a lancé le premier du genre. Désormais, les institutionnels auront une alternative entre un engagement long avec la souscription dans ces fonds et l’opportunité d’investir en Bourse sur ce secteur pour des placements liquides.
Christophe Tricaud