Jean-Marc Peter, directeur général de Sofidy, est l’invité de l’émission « Les acteurs de la pierre-papier ». Sujets du jour : bilan 2019 et perspectives 2020 pour cet acteur historique désormais filiale du groupe Tikehau. Et qui a multiplié les lancements au cours des trois dernières années. Interview.
Jean-Marc Peter, vous êtes directeur général du groupe Sofidy. Sofidy se présente comme un « acteur de référence » dans la gestion des fonds immobiliers, avec un encours sous gestion d’environ 6 Md€ actuellement. Vous faites également partie des acteurs historiques, puisque vous gérez notamment, depuis 1988, la SCPI Immorente. L’une des plus importantes du marché, avec une capitalisation de plus de 3,3 Md€… Que peut-on ajouter ?
Jean-Marc Peter – Nous sommes effectivement un acteur historique de ce secteur. J’ajoute que nous faisons aussi partie de ceux qui ont poussé au plus loin la diversification de leurs investissements. Au dernier comptage, nous gérions en effet plus de 4 400 locataires, tous fonds confondus.
Restons pour l’instant sur le marché des SCPI. 2019 a été une année exceptionnelle en termes de collecte. Qu’en est-il côté Sofidy ? Et, plus globalement, quel bilan tirez-vous de l’exercice 2019 pour le groupe ?
Jean-Marc Peter – La collecte 2019 a été effectivement assez soutenue. Nous avons pour notre part recueilli un peu plus de 600 M€ sur nos 5 SCPI. Soit largement plus qu’en 2018. Il faut toutefois rappeler que cet exercice se caractérisait par une faible collecte. Début 2018, l’ensemble des acteurs du marché pariait en effet sur une remontée des taux. Qui, finalement, n’a pas eu lieu. Notre collecte 2019, quoiqu’en hausse, reste toutefois contenue. Notre stratégie de limitation des souscriptions – à 100 000 € par souscripteur, en flux et en stock- est toujours d’actualité.
Je rappelle que les SCPI ont affiché en moyenne un rendement de 4,4% en 2019. Comment se situent vos propres véhicules par rapport à cette moyenne. Et à leurs performances en 2018 ?
Jean-Marc Peter – Nous sommes assez satisfaits de l’exercice écoulé. Je rappelle que nous gérons deux des plus grosses SCPI françaises. Immorente, la plus grosse, avec plus de 3 Md€. Mais aussi Efimmo, qui pèse quasiment 1,5 Md€. Et, malgré cela, nos SCPI affichent des rendements 2019 supérieurs à la moyenne du marché. Efimmo, notre SCPI de bureaux, a dégagé un rendement de 4,97%. Et Immorente de 4,64%. Contre, effectivement, 4,4% pour la moyenne du marché. Nous avons en effet maintenu les dividendes aux mêmes niveaux que ceux de l’année précédente. Mais en affichant, en plus, une légère augmentation des prix de la valeur des parts. De l’ordre de 2% pour Efimmo. Et d’un peu plus de 1% pour Immorente…
Donc, en fait, les DVM, c’est-à-dire les taux de distribution, sont en légère baisse. Mais, compte tenu de l’augmentation de la valeur de la part, la performance globale est en hausse….
Jean-Marc Peter – Exactement. L’immobilier c’est, d’une part, du rendement, et d’autre part, de la plus-value. Quand on additionne les deux, on arrive à une performance globale de l’ordre de 6 à 7% pour nos deux principales SCPI en 2019.
Un autre fait marquant pour Sofidy, c’est le passage sous le contrôle majoritaire du groupe Tikehau fin 2018. Qu’est-ce que cela a changé pour vous, en pratique ?
Jean-Marc Peter – Je pourrais dire que cela n’a rien changé. Car Sofidy continue de fonctionner exactement de la même façon que précédemment. En revanche, l’arrivée du groupe Tikehau nous confère deux avantages assez importants. Le premier, c’est la solidité et la puissance de ce nouvel actionnaire. Tikehau dispose de 3 Md€ de fonds propres. Ce qui donc, évidemment, est de nature à rassurer les épargnants qui pourraient éventuellement être intéressés par le fait d’investir dans nos produits. Le deuxième avantage, que l’on a bien senti en 2019, c’est que Tikehau dispose d’équipes à l’étranger. Notamment à Londres, en Espagne, ou en Italie. Nous nous appuyons donc sur ces équipes pour commencer à étudier ces marchés. Pour, peut-être demain, réaliser nos premiers investissements en Europe du Sud, ou en Angleterre.
Sofidy est également présent sur le marché de l’immobilier coté. Votre fonds Sélection 1, géré par Laurent Saint Aubin, a passé le cap des 100 M€ de capitalisation. Qu’est-ce que cela signifie ? Que Sofidy a conquis ses lettres de noblesse dans la gestion des actifs immobiliers cotés ?
Jean-Marc Peter – Je le pense, oui. Au dernier comptage, l’encours du fonds dépasse même les 120 M€. Sélection 1 est effectivement géré par Laurent Saint Aubin et ses équipes. C’est une gestion de conviction. L’idée est de battre l’indice de référence des foncières cotées européennes. En 2019, une nouvelle fois, le fonds est en surperformance par rapport à cet indice. Qui lui-même a évolué de façon très favorable l’an dernier.
Cette expertise confirmée vous permet de lancer un nouveau support dédié à l’épargne salariale, majoritairement investi en immobilier coté… Quelles sont les caractéristiques de ce nouveau produit ?
Jean-Marc Peter – Il s’agit du premier fonds d’épargne salariale indirectement investi dans l’immobilier. Nous l’avons créé en partenariat avec la société Eres. D’où son nom de Sofidy Eres Immobilier. Il sera investi dans Sofidy Sélection 1, mais aussi dans notre OPCI grand public, Sofidy Pierre Europe. Ce dernier a lui aussi très bien performé en 2019, avec une performance de près de 7%.
Quelles sont les priorités du groupe pour 2020 ? Prévoyez-vous d’autres lancements ? Ou comptez-vous capitaliser sur la gamme existante, qui est finalement assez complète ?
Jean-Marc Peter – Nous n’avons pas prévu de nouveaux lancements, qui ont été nombreux au cours des trois dernières années. Pour 2020, l’idée est vraiment de mettre l’accent sur ces nouveaux fonds. Tout en consolidant les performances de nos fonds historiques, Immorente et Efimmo notamment. Parmi ces nouveaux fonds, on retrouve ceux que je viens de citer, Sofidy Sélection 1 et Sofidy Pierre Europe. Mais aussi un fonds dédié aux contrats d’assurance-vie, Sofidy Convictions Immobilière. Il s’agit en l’occurrence d’un fonds de fonds. On retrouve également une SCPI lancée il y a peu de temps, et qui marche très bien, Sofiprime. Elle investit dans du résidentiel haut-de-gamme parisien. Celui qui intéresse la clientèle étrangère.
Ce fonds, Sofiprime, connaît-il un développement satisfaisant ?
Jean-Marc Peter – Son développement est en phase avec nos projections. Son encours est d’environ 50 M€. Et Sofiprime dégage depuis deux ans des performances intéressantes, avec des évolutions de valeur de parts positives. Cet immobilier parisien, celui du Marais, de Saint-Germain des Prés, de Montmartre, échappe, dans une certaine mesure, aux cycles de l’immobilier. En raison d’un effet de rareté, bien sûr. Mais également parce qu’il intéresse une clientèle non pas nationale, mais internationale.
Vous évoquez les cycles dans l’immobilier. Justement, cette classe d’actifs attire, on le sait, de plus en plus d’investisseurs. Plus de 40 Md€ ont été investis sur le seul marché français en 2019. Du coup, les rendements baissent. Alors que les taux d’intérêt sont désormais au plus bas. Peut-on continuer à dégager de la performance dans l’immobilier ?
Jean-Marc Peter – La réponse est oui. Une période de bulle se caractérise par le fait que l’on ne rémunère plus les risques. Or, historiquement, le risque immobilier n’a jamais été autant rémunéré. Quand on regarde le « spread« , c’est-à-dire ce que rapporte l’immobilier en moyenne par rapport au coût de l’argent, il est quasiment de 300 points de base. Même plus, si l’on compare avec le rendement de l’immobilier acheté par les SCPI. C’est un niveau historique. Il y a donc encore des marges de progression de performance sur cette classe d’actifs qui, on le sait, intéresse beaucoup les Français. Qui la considèrent d’ailleurs aussi un peu comme une valeur refuge.
Mais, côté investisseurs, comment fait-on aujourd’hui pour trouver des actifs rentables ? Quel est, d’ailleurs, le positionnement de Sofidy, en termes de style de gestion, sur le secteur immobilier ?
Jean-Marc Peter – Sofidy a toujours été un peu « contrariant » dans sa logique d’investissement. Nous évitons les actifs « évidents« , c’est-à-dire les actifs absolument parfaits, neufs, bien situés, bien loués… Ce sont les actifs qui intéressent tous les investisseurs. Qu’ils soient nationaux, internationaux, privés ou institutionnels. Nous ne transigeons jamais sur la qualité de l’emplacement. Mais nous sommes en revanche plutôt un acheteur d’immobilier de seconde main. C’est-à-dire que nous pouvons acheter des actifs qui datent d’une dizaine d’années. Et que nous ne rechignons pas non plus à acheter des actifs qui ont plusieurs locataires. C’est plus de travail, certes. Raison d’ailleurs pour laquelle ils intéressent moins d’investisseurs. Surtout, nous sortons de France. Nous achetons en Allemagne, aux Pays-Bas. Et peut-être demain, je l’ai dit, dans les pays d’Europe du Sud -de façon prudente et modérée-. Et nous n’achetons pas que des commerces et des bureaux. Nous sommes des acheteurs historiques, par exemple, de terrains de camping haut-de-gamme. Nous sommes aussi acheteurs de petite logistique. Celle qui bénéficie du déploiement du e-commerce. Autrement dit, nous diversifions. Juste un chiffre : les investissements, en Europe, en 2019, représentent 280 Md€. Ce qui permet de relativiser le poids relatif des SCPI. Certes, elles ont collecté 8,6 Md€ l’an dernier. Mais le marché sur lequel elles interviennent est, on le voit, très profond.
Le marché de l’immobilier est de plus en plus profond. Il est aussi de plus en plus responsable. Une thématique qui est quasiment devenue mainstream dans la sphère financière. Et que l’immobilier est à son tour en train de s’emparer. Quid de Sofidy ? ISR, ESG, ce sont des sujets sur lesquels on vous entend rarement…
Jean-Marc Peter – Ce n’est pas parce que l’on ne nous entend pas trop que l’on ne fait rien… Nous sommes en réalité très actifs. Nous attendons, comme d’autres, la sortie du label ISR pour les fonds immobiliers. Mais travaillons déjà pour l’obtenir pour notre OPCI Sofidy Pierre Europe. Nous nous sommes organisés en interne, avec notamment la mise en place d’un comité ESG. Et nous nous appuyons également sur les avancées importantes que le groupe Tikehau a réalisées sur ces sujets.
Dernière question, rapidement. Le marché des acteurs de la pierre-papier, on le sait, bouge. Et se restructure. De nouvelles sociétés de gestion apparaissent. D’autres changent de main. Sofidy est-elle à l’affût ?
Jean-Marc Peter – Tout le monde est à l’affût. Il pourrait effectivement, demain, y avoir des sociétés de gestion en vente. Nous regarderons le dossier. Mais une chose est claire. Les prix auxquels s’échangent les sociétés de gestion sont devenus très élevés. Or il n’est pas dans notre culture de surpayer aussi bien l’immobilier que, demain, des sociétés de gestion….
Propos recueillis par Frédéric Tixier
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A propos de Sofidy(i)
Depuis 1987, Sofidy conçoit et développe des produits d’investissement et d’épargne (SCPI, OPCI, SCI, SIIC, OPCVM Immobilier, Fonds dédiés) orientés principalement vers l’immobilier de commerces, et de bureaux. Gestionnaire de référence dans le paysage de la gestion d’actifs immobiliers en France et en Europe, Sofidy est régulièrement distingué pour la qualité et la régularité des performances de ses fonds. Sofidy gère pour le compte de plus de 50 000 épargnants, et un grand nombre d’institutionnels, un patrimoine immobilier d’une valeur de près de 5,4 milliards d’euros ; constitué de plus de 4 200 actifs commerciaux et de bureaux. Sofidy est une filiale de Tikehau Capital.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société