Antoine Depigny et Xavier Cheval, respectivement directeur des fonds retail et directeur du pôle santé chez Praemia REIM, reviennent sur les caractéristiques de ce segment de marché – l’immobilier de santé -, et rappellent l’engagement historique de leur groupe dans ce secteur. Interview.
Frédéric Tixier – Avant d’aborder plus en détail le secteur de l’immobilier de santé, pouvez-vous nous dresser un état des lieux de la situation de Praemia REIM France, un an après votre changement de dénomination ?
Praemia REIM, un an après la scission avec Primonial ?
Antoine Depigny – En effet, un an après la scission avec Primonial, qui assurait jusqu’alors notre distribution – et qui a depuis rejoint le groupe Laplace[1]– , Praemia REIM France est aujourd’hui une société de gestion d’épargne immobilière pleinement indépendante. Elle gère environ 34 Md€ d’actifs répartis dans toute l’Europe. Cette évolution s’est accompagnée d’une réorganisation autour de deux grands pôles. Un pôle dédié à la gestion des actifs, notre cœur de notre métier. Et un pôle orienté vers ce que l’on appelle, peut-être maladroitement, la gestion du passif, mais qui regroupe en réalité la gestion des relations avec nos investisseurs et souscripteurs.
Frédéric Tixier – Le terme de « gestion du passif » est peut-être effectivement un peu inapproprié…
Antoine Depigny – C’est vrai… Disons que, dans notre activité de gestion de fonds, cette dimension existe bel et bien. D’autant que nous avons connu une phase d’expansion marquée, suivie aujourd’hui d’une période plus complexe pour le marché immobilier, avec des réalités très contrastées selon les typologies d’actifs.
Immobilier de santé : un axe de diversification majeur pour Praemia REIM
Frédéric Tixier – Venons-en à l’immobilier de santé. Vous avez commencé à investir dans ce secteur il y a plusieurs années. Pourquoi ce choix ? Une volonté de diversification vers des actifs dits « alternatifs » ?
Antoine Depigny – Oui, c’est exactement cela. Il y a une dizaine d’années, notre portefeuille était encore très classique : entre 60% et 70 % de bureaux. Environ 20 % de commerces. Et une part très marginale consacrée à l’immobilier alternatif. Mais nous avons rapidement perçu l’intérêt de ces actifs dits alternatifs, et notamment leur capacité à offrir une résilience face aux cycles économiques. C’est pourquoi nous avons progressivement fait évoluer notre allocation pour intégrer davantage d’immobilier de santé. Mais aussi d’autres segments, comme le résidentiel géré.
Frédéric Tixier – Xavier, quels sont selon vous les atouts fondamentaux de la classe d’actifs « immobilier de santé » ? Et quels sont les volumes investis dans ce secteur en France et en Europe ?
Les avantages structurels d’une classe d’actifs réputée résiliente
Xavier Cheval – L’immobilier de santé présente plusieurs avantages majeurs pour un investisseur à la recherche de rendements stables sur le long terme. D’abord, ce sont des actifs d’exploitation spécifique. Avec des locataires qui s’engagent sur de longues durées. Souvent sur plusieurs décennies, comme c’est le cas pour les hôpitaux ou les EHPAD. Ensuite, c’est un secteur soutenu par des financements publics solides. En France, via l’Assurance maladie. Ou, dans d’autres pays, via des dispositifs nationaux ou régionaux. Cela apporte une sécurité financière supplémentaire. Il existe également des barrières à l’entrée réglementaires, notamment des autorisations d’exploitation. Ce qui limite la concurrence, et protège la valeur des actifs existants. Et enfin, le sous-jacent démographique est très porteur. Le vieillissement de la population, les progrès médicaux, tout cela alimente une demande croissante en infrastructures de santé.
Un peu moins de 450 M€ investis dans l’immobilier de santé en 2024
Frédéric Tixier – Nous sommes donc face à une vraie mégatendance. En termes de volumes d’investissement, quel ordre de grandeur ?
Xavier Cheval – L’année 2024 a été relativement calme en France. Avec un peu moins de 450 millions d’euros investis dans l’immobilier de santé, un chiffre inférieur à la moyenne historique. Sur une période plus longue, on tourne plutôt autour du milliard d’euros par an dans l’Hexagone. Au niveau européen, les volumes sont d’environ 4 Md€ par an. Concentrés principalement dans les grands pays comme l’Allemagne et la France. Cela reste donc un marché de niche, comparé au marché global de l’immobilier d’entreprise.
Frédéric Tixier – Pour donner une idée, le marché global de l’immobilier d’entreprise en Europe tourne habituellement autour de 30 milliards d’euros annuels. Même si on est plutôt autour de 20 milliards aujourd’hui…
Xavier Cheval – Oui, en incluant toutes les classes d’actifs (bureaux, commerces, santé, etc.), on est certainement un peu au-dessus de 20 milliards. Mais l’immobilier de santé reste un segment alternatif, encore relativement restreint.
Les principaux intervenants sur l’immobilier de santé en Europe ?
Frédéric Tixier – Qui sont vos principaux concurrents, en Europe, sur ce segment ?
Xavier Cheval – Nous avons deux grandes catégories de concurrents. D’une part, les foncières cotées spécialisées, principalement non françaises. Deux acteurs belges – Aedifica et Cofinimmo – sont particulièrement actifs et envisagent d’ailleurs actuellement une fusion. Ensemble, ils représentent environ 12 Md€ d’actifs en immobilier de santé, avec une spécialisation dans les EHPAD. D’autre part, nous avons des gestionnaires d’actifs, comme nous, soit spécialisés, soit diversifiés avec une exposition à la santé. On peut citer La Française, BNP Paribas REIM, Euryale. Ainsi que des acteurs plus généralistes comme Amundi ou Arkéa.
Frédéric Tixier – Et qu’est-ce qui vous différencie, chez Praemia REIM, de ces autres opérateurs ?
Praemia REIM : un engagement historique dans ce secteur
Xavier Cheval – Je dirais que notre force repose sur la profondeur de notre engagement dans ce secteur, dès une époque où peu d’acteurs y croyaient encore. Cela nous a permis de constituer des équipes dédiées, d’acquérir une vraie expertise sectorielle et de développer un portefeuille significatif. Ce qui nous donne du poids dans nos échanges avec les opérateurs de santé. Il faut rappeler que l’immobilier de santé est un immobilier d’exploitation. Ce qui suppose une relation plus stratégique que purement contractuelle avec nos locataires. Il est en effet essentiel de coconstruire avec eux des solutions sur le long terme.
Propos recueillis le 2 juillet 2025
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A propos de Praemia REIM(i)
Praemia REIM est un gestionnaire d’actifs immobiliers européen de premier plan, avec plus de 36 milliards d’euros d’actifs sous gestion et un portefeuille de plus de 1 600 immeubles dans 11 pays. La société conçoit et gère une large gamme de solutions d’investissement immobilier, couvrant les secteurs de bureaux, santé et éducation, commerce de détail, résidentiel et hôtellerie, avec un fort engagement en faveur de la performance à long terme et de l’intégration ESG. Elle compte plus de 450 collaborateurs répartis entre la France, l’Allemagne, le Luxembourg, l’Italie, l’Espagne, Singapour et le Royaume-Uni.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.
[1] Une marque du groupe Crystal.