Laurent Saint Aubin, gérant actions spécialiste de l’immobilier européen chez Sofidy, s’interroge sur l’évolution des sous-jacents de l’industrie immobilière, et plus particulièrement les formats d’avenir de l’immobilier commercial, boutiques indépendantes, réseaux de distribution, retails parks ou encore internet.
D’abord perçu comme un concurrent, le commerce en ligne se révèle aujourd’hui être un allié de taille pour le commerce physique. Dans la stratégie de très nombreuses marques comme la FNAC, commerce physique et internet sont devenus complémentaires. C’est le cas de la stratégie de distribution multicanale de Marks & Spencer reposant sur un réseau de magasins physiques pour l’alimentaire ainsi qu’une sélection d’habillement limitée, et sur le canal électronique pour accéder à une offre textile plus exhaustive. A l’inverse, on observe aussi la progression des acteurs du commerce en ligne vers le commerce physique avec dernièrement l’ouverture de la première librairie d’Amazon aux États-Unis, à Seatle.
Le succès des lieux de « showroom » des marques – Les boutiques « showrooms » de centres-villes dont le concept a été largement développé par des enseignes très en vue (Apple, Nespresso…) font désormais partie intégrante de l’identité des marques premium. Si leur visite peut générer des actes d’achats impulsifs, ce n’est pas leur mission première qui est intimement liée à leur image de marque. Le succès de ces « showrooms » auprès du public permet de comprendre la valeur potentiellement infinie du high street retail dans des rues à fort trafic. En juin 2014, l’achat mémorable par Chanel de 600 m2, au 51 avenue Montaigne à Paris, pour 140 millions d’euros, en témoigne. D’une façon dérivée, ce concept de « showroom » rejaillit également sur l’attractivité des villages de marques en périphérie des villes.
L’essor des commerces de bouche des centres-villes – Un autre bastion du commerce physique réside également dans les centres-villes des grandes agglomérations et concerne les achats de produits de première nécessité non planifiés. Il s’observe notamment au travers du développement très important des supérettes alimentaires. La force de ces commerces de proximité réside dans le fait qu’ils sont capables de proposer de larges plages d’horaires d’ouverture, adaptées aux horaires décalés des citadins. A cette tendance liée à l’évolution des rythmes de vie en ville, s’ajoute l’essor de l’offre de restauration sur le pouce qui est aujourd’hui complémentaire.
Le renouveau des très grands centres commerciaux – Rénovant en profondeur leur image de marque, la nouvelle tendance au sein des très grands centres commerciaux est marquée par une plus grande sophistication dans la conception architecturale et la présentation des points de vente des enseignes, notamment des marques textiles. A cela, s’ajoute l’éclosion d’une offre de services très globale comprenant des activités ludo-récréatives pour les enfants, des activités de loisirs (cinémas, restaurants…), des espaces pour la livraison de colis, des services de teinturerie… En Scandinavie, les bibliothèques et les services publics implantés dans les centres commerciaux sont de plus en plus fréquents. On a même vu l’implantation d’un casino au sein du récent Polygone Riviera à Cagnes-sur Mer.
Espaces éphémères – Enfin les allées de circulation élargies des très grands centres accueillent des espaces de ventes éphémères créés par les marques à l’occasion du lancement de nouveaux produits. La mise en place de cartes de fidélité qui traquent les habitudes de consommation des clients qui fréquentent ces très grands centres commerciaux vient corroborer cette rénovation en profondeur en permettant de leur proposer des offres ou des invitations complètement personnalisées, visant à renforcer leurs liens de fidélité et la fréquence de leurs visites.
Les boutiques « showrooms » pour des marques premium, le commerce de bouche dans le centre-ville des grandes agglomérations et les très grands centres commerciaux qui développent une offre de loisirs et de services globale sont selon nous les trois grandes dynamiques à regarder de près pour investir dans l’immobilier commercial.
A propos de Laurent Saint Aubin
Laurent Saint Aubin a débuté sa carrière en 1986 comme analyste financier à la Banque de l’Union Européenne avant de rejoindre la société de Bourse Ferri puis le CCF. Il a été ensuite Directeur Général d’ING France Securities en charge des activités de marché Actions à Paris, puis, à compter de 2006, responsable des activités de vente et de recherche sur l’immobilier coté au sein du groupe Aurel BGC. Membre de la SFAF, il a reçu en 2012 le trophée du meilleur analyste des sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC). Depuis 2014, il gère le FCP Sofidy Sélection 1, où il développe une gestion discrétionnaire visant à « surperformer, via une exposition aux actions du secteur immobilier de l’Union européenne, l’indicateur de référence FTSE EPRA/NAREIT Euro Zone Capped dividendes nets réinvestis ».