Épargner est une aventure. Tout investisseur boursier le sait. Mais n’est-ce pas le lot de tous les placements sans exception ? Le couple risque – rentabilité ne dit rien d’autre. Plus la rentabilité espérée est élevée, plus le risque est important. Ah, si c’était aussi simple !
Épargner, placer, investir… cela signifie transporter de l’argent dans le temps. Vous avez une certaine somme. Ou vous réussissez à mettre un peu de côté chaque mois. Et vous voulez retrouver tout cela dans cinq, dix ou quinze ans. Autrement dit vous organisez un voyage pour votre argent, un voyage dans le temps.
Je ne sais pas si vous savez d’où vient l’expression « bon voyage »… Eh bien autrefois, les routes étaient peu sûres, les naufrages plus fréquents, les mœurs non plus n’étaient pas les mêmes, et quand quelqu’un partait on ne savait pas quand on aurait de ses nouvelles ! C’était toute une aventure. Alors, par superstition on lui souhaitait « bon voyage ». Et on gardait pour soi le petit pincement au cœur signalant qu’on risquait de ne pas le revoir.
Quand on prend un point de vue historique, notre époque est exceptionnellement douce. On parle aujourd’hui d’accidents, parce que la normale, la très grande majorité des cas est d’arriver à bon port. Et le « bon voyage » est devenu une formule sympathique et chaleureuse.
Mais l’épargne est toujours un voyage dans le temps, une aventure, avec parfois des accidents.
La sécurité des placements n’est jamais absolue
Tant qu’il y aura de l’argent, il y aura des voleurs. Il y aura donc des gendarmes qui améliorent sans cesse leur efficacité, ce qui incite les nouveaux voleurs à être plus imaginatifs, et les nouveaux gendarmes redoublent d’inventivité pour être bientôt rattrapés par des voleurs encore plus créatifs, dans un jeu qui probablement ne s’arrêtera jamais. Un jeu qui se joue aujourd’hui avec internet, les réseaux sociaux, de faux mails parfois suivis d’entretiens téléphoniques, et des cyberattaques.
Récemment par exemple, des particuliers qui s’étaient regroupés en association pour acheter des crypto-monnaies ont appris que leurs cinquante millions d’euros s’étaient soudain évaporés, en l’espace d’une nuit. Vous vous endormez le soir, heureux de participer à une aventure enrichissante, et le lendemain matin vous apprenez que votre épargne digitale s’est noyée dans le cloud… dans ce cas précis, il semblerait que ce soit une cyberattaque. Mais très souvent aussi, trop souvent, on apprend que des particuliers ont fait des virements vers des banques ou des sociétés de placement qui en réalité n’existaient pas, ou ont investi dans des maisons de retraite parfaitement fictives. Escroqueries par internet et téléphone.
Autrement dit, dans l’aventure des placements il y a plusieurs sortes de risques.
Épargne : quels sont les deux premiers risques
D’abord le risque de vol. Relativement facile à éviter. Les banques, les compagnies d’assurances, les sociétés de gestion, les fonds d’investissement immobiliers ou financiers, les professionnels du conseil, tout ce qui a rapport à la Bourse, sont extrêmement réglementés. En restant sur les chemins fréquentés, on élimine l’essentiel du risque d’indélicatesse.
Alors Madoff, me direz-vous ? Plus de 50 milliards, pour parler en euros, et des banques réputées y ont entraîné leurs clients, jusqu’à la catastrophe de 2008 ! Alors là, désolé, je vais peut-être choquer, mais je connais une personne qui m’avait expliqué très simplement qu’il ne fallait surtout pas y aller. Pourquoi ? Quand, avec des placements classiques, quelqu’un fait beaucoup mieux que le marché à un certain moment, c’est remarquable, on peut le féliciter pour sa performance. Mais quand il fait beaucoup mieux que le marché année après année, cela devient étrange, il faut commencer à vraiment l’interroger. Or avec le placement Madoff, il n’y avait pas de réponse convaincante. Simple, trop simple.
Avec ces deux règles : un, pratiquer les chemins bien fréquentés, et deux ne pas se laisser séduire par de trop belles performances, on peut voyager en relative sécurité au regard des voleurs de grands chemins.
Les risques de l’aventure
Mais il reste l’aventure, la vraie ! Et on ne pourra jamais empêcher l’épargne d’y aller.
- Jouer en Bourse sur des petites entreprises dont on pense qu’elles changeront le monde, pourquoi pas ? On peut gagner, on peut perdre, c’est le jeu.
- Quand plus de cinquante millions de particuliers dans le monde, car c’est le chiffre aujourd’hui, s’amusent à acheter des crypto-monnaies dont certaines disparaitront sans laisser de traces, pourquoi se priver du frisson du pari peut-être intelligent, donc gagnant ?
- Certaines plateformes sont en train de renouveler le « trading », autrement dit l’achat et la revente rapide d’actions en Bourse, et attirent des jeunes. Ainsi le fameux Robinhood, en français « Robin des bois », qui vient de dépasser les trente millions de traders, moyenne d’âge environ trente ans, et qui propose un investissement boursier assez éloigné des bonnes vieilles pratiques.
Et alors ? Si le risque est connu. Si on joue avec l’argent que l’on peut perdre, et pas plus.
Peut-être faut-il rappeler qu’il n’y aurait pas d’internet aujourd’hui s’il n’y avait pas eu la fameuse bulle… certains ont perdu, d’autres ont gagné, mais des entreprises ont été financées et celles qui ont survécu ont changé le monde.
Faut-il être toujours sérieux avec l’argent ?
Il y a certes un peu de folie, mais aussi de la magie, dans les enthousiasmes de l’épargne. Et puis, dans un monde compliqué, parfois étouffant, dans lequel les nouvelles générations se cherchent, dans lequel aussi on découvre progressivement de nouvelles applications du digital, il n’est pas étonnant que cela bouge, que les modes d’épargne se renouvellent, que l’on s’engage dans de nouvelles expériences.
Alors, restons sérieux pour les finances personnelles ou familiales. Mais rien n’empêche de se préserver un petit espace de liberté, selon la recommandation de Voltaire : « Cultivons notre jardin ».
Je vous souhaite une très bonne journée
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