Le nouveau texte européen encadrant les fonds d’investissement alternatifs (FIA), au premier rang desquels figurent les fonds immobiliers non cotés en Bourse et donc bien sûr les SCPI et les OPCI sera transposé prochainement en droit français pour s’inscrire dans le droit positif au plus tard en juillet 2013. En fin de semaine, l’AMF publiera le projet de rapport du Comité de Place sur la transposition de la directive AIFM et le développement de la gestion innovante en France. Une consultation de place suivra jusqu’au 10 juillet prochain avant la publication d’ici la rentrée par la commission européenne de son règlement et les dispositions techniques adoptées par l’autorité européenne des marchés financiers (ESMA).
Dans cette dernière ligne droite, l’Association des professionnels des sociétés de placement immobilier (ASPIM) a consacré mardi 12 juin son colloque annuel à cette directive. Guillaume Eliet, directeur de la gestion d’actifs à l’Autorité des marchés financiers (AMF) a ouvert les débats en rappelant la nature et les contours du nouveau cadre réglementaire européen. D’emblée, il a rassuré son auditoire en plaçant l’actuelle réglementation des sociétés de gestion de portefeuille « déjà au niveau des nouvelles exigences européennes ». Si tous les gestionnaires devront être dotés du statut de société de gestion de portefeuille, la majorité des gérants de SCPI ont déjà adopté ce statut. Selon lui si ce texte est un texte de crise inspiré par les conséquences de la chute de la banque Lehman Brothers et la fraude Madoff mais ces affaires ont finalement consacré la notion française de dépositaire indépendant au centre de la nouvelle directive. Le représentant du régulateur a préféré insister sur le ton volontaire et offensif du rapport mis en consultation qui souligne de nouveaux champs ouverts aux gestionnaires avec la mise en place du passeport européen des sociétés de gestion et le passeport européen accordé aux produits eux-mêmes. Dans son intervention, il a manifesté à plusieurs reprises le souci de compétitivité, toujours présent au sein des travaux du comité de place.
Et c’est bien la compétitivité des SCPI qui a le plus mobilisé les dirigeants de sociétés de gestion de SCPI qui ont débattu à la tribune dans le sillage de son intervention. Dominique Paulhac, président du directoire de HSBC REIM a exprimé ses réserves sur les dépositaires externes imposés par le nouveau texte en s’inquiétant des conséquences de son intervention sur la relation forte qui lie les sociétés de gestion et les souscripteurs de fonds immobiliers. Mais il s’est réjoui qu’on s’oriente vers un rôle a minima du dépositaire tandis que les sociétés de gestion devraient conserver la gestion du passif et notamment celle de la fiscalité des parts de SCPI. Le rôle des dépositaires seraient ainsi cantonné à celui d’un super commissaire au compte. De quoi limiter leur coût alors que les sociétés de gestion avec une rémunération qui se limite à 0 ,8 % de leurs encours, déjà sensiblement inférieure à celle des gérants d’OPCVM. Jean-Marc Coly , directeur général de La Française REM, lui a succédé sur le thème des expertises en se félicitant que la responsabilité de la valorisation demeure in fine à la société de gestion et en se réjouissant que le surcroît de transparence ainsi apportée conforte le marché des parts de SCPI, qu’elles soient à capital fixe ou à capital variable. « Le problème des experts c’est leur coût » s’est-il seulement borné à critiquer leur intervention. La profession semble avoir obtenu que les visites d’immeubles – le plus cher dans ces expertises- reste quinquennal, assorti d’un simple suivi annuel des valorisations selon les loyers effectivement encaissés et les conditions de marché.
L’accouchement du nouveau cadre européen doit aussi être l’occasion de moderniser le cadre de gestion des SCPI. C’est un point qui semble faire consensus entre les professionnels et le régulateur, qui semble actuellement assez ouvert sur le sujet. « C’est une nécessité » prévient Frédéric Bôl, président du directoire et fondateur de Viveris REIM qui envie la souplesse juridique du droit luxembourgeois (à ne pas confondre avec les opportunités fiscales du grand-duché !). En citant plusieurs axes de travail. Le principal d’entre eux tient à la capacité pour les gestionnaires de travailler plus en profondeur la matière immobilière des actifs qu’il gère. En clair les SCPI veulent se doter des moyens de réaliser des restructurations lourdes de leur patrimoine « sans devenir pour autant des promoteurs ». Il faudra pour cela les autoriser à passer davantage de provisions pour gros travaux. Mais gageons que leurs gestionnaires sauront ne pas dénaturer ce produit qui restera avant tout un produit de rendement… « Il faut desserrer les contraintes sans dépasser les limites » explique Jean-Marc Coly.
Le passeport européen enfin est apparu aux professionnels comme une opportunité mais aussi comme un véritable défi, quoi que dans un premier temps il n’autorisera que des opérations à l’égard des investisseurs avertis, le grand public n’étant pas concerné, au mieux avant 2018, a rappelé Guillaume Eliet. Dominique Paulhac, qui aimerait bien aller vendre des SCPI aux français installés à Londres devra donc attendre encore un peu. Frédéric Bol, de son côté, annonce déjà l’installation d’équipes en Allemagne pour répondre à la soif de diversification internationale de ses clients. Jean-Marc Coly adopte également une stratégie conquérante en voulant multiplier des structures de distribution à l’étranger.
Pierrepapier.fr
A propos de la directive AIFM
La directive des fonds d’investissements alternatifs (AIFM) est la voiture balai de la régulation européenne de la gestion collective. Elle fixe le nouveau cadre européen de la gestion collective des Fonds non couverts par les textes visant les OPCVM classiques, et vise donc aussi bien les hedge funds que les fonds immobiliers. Concernant les SCPI, elle instaure l’obligation d’un dépositaire externe aux sociétés de gestion. La directive vise à créer un marché intérieur pour les gestionnaires et un cadre réglementaire et en matière de surveillance harmonisé et strict pour les activités dans l’Union de tous les gestionnaires, y compris ceux ayant leur siège statutaire dans un État membre.