L’IEIF vient de publier une étude sur l’immobilier de tourisme, en s’intéressant plus particulièrement aux actifs hôteliers. Objectif : analyser, chiffrer, et mettre en perspective les grandes tendances qui impactent ce secteur, de plus en plus prisé des investisseurs. Explications, avec Stéphanie Galiègue, directrice de la Recherche et des Études de l’IEIF.
Pierrepapier.fr – L’IEIF vient de publier une importante étude sur l’immobilier de tourisme. Quelles activités recouvre ce secteur ?
Stéphanie Galiègue – L’immobilier de tourisme revêt plusieurs formes. En France, par exemple, avec 18 000 établissements et 210 millions de nuitées, les hôtels en sont les acteurs les plus importants. Les campings – 8 300 unités et 124 millions de nuitées – et les résidences de tourisme – 2 160 établissements et 95 millions de nuitées – viennent compléter une offre traditionnelle désormais concurrencée par les nouveaux acteurs de l’immobilier collaboratif, comme Airbnb. Mais les frontières entre les actifs immobiliers semblent de moins en moins marquées. On trouve aujourd’hui des bureaux qui offrent des services hôteliers – conciergerie, hall d’accueil… – et des hôtels qui accueillent des bureaux dans des espaces de coworking. Le secteur est en réalité de plus en plus complexe, et en proie à de fortes mutations, liées à l’émergence de nouveaux modèles. On observe, par exemple, que les investisseurs qui s’étaient longtemps concentrés sur la détention des seuls murs cherchent désormais également à acquérir les fonds de commerce. Ou que, côté exploitants, le marché se concentre, puisque deux groupes représentent à eux seuls les trois quarts de l’offre de chaînes intégrées. Ce sont ces tendances – parmi d’autres – qu’il nous a paru important de détailler et de remettre en perspective au sein de l’étude que nous venons de publier.
Pierrepapier.fr – Quels sont les atouts de l’actif hôtelier, comparé aux autres classes d’actifs immobiliers ?
Stéphanie Galiègue – L’actif hôtelier est un actif contracyclique : sa performance dépend des flux touristiques mondiaux et davantage de l’attractivité internationale du pays où il est implanté que de ses cycles économiques. De ce fait, il constitue une source de diversification intéressante pour les investisseurs. Il offre en outre des performances plus régulières et plus élevées que les autres actifs immobiliers. Sur les 10 dernières années (fin 2007-fin 2017), le secteur de l’hôtellerie a ainsi dégagé une performance globale de 6,8 %, contre 6,2 % pour les locaux d’activités et la logistique, et 5,1 % pour les bureaux ou les commerces. Le secteur bénéficie également d’une conjoncture porteuse, notamment en France – avec l’objectif du gouvernement d’atteindre un flux de 100 millions de touristes d’ici 2020 -, et d’une offre qui gagne en qualité : 40 % du parc français sont aujourd’hui labelisés 3 étoiles – contre 28 % en 2010 -, et 24 % aux normes 4 et 5 étoiles – contre 11 % en 2010.
Pierrepapier.fr – Votre étude témoigne que les investisseurs s’intéressent de plus en plus à cette classe d’actifs. Quid des véhicules de la pierre-papier (SCPI, OPCI, SIIC) ?
Stéphanie Galiègue – Encore minoritaires dans le patrimoine des investisseurs institutionnels, les actifs hôteliers séduisent effectivement de plus en plus d’acteurs. En attestent les volumes de transactions hôtelières qui sont en progression constante en Europe (plus de 20 milliards d’euros, fin 2017). Les OPCI, professionnels ou grand public, sont les plus exposés, avec 6% de leurs encours sous gestion investis en actifs hôteliers. Un OPCI en particulier, LF Cerenicimo +, est d’ailleurs exclusivement positionné sur ce secteur. Côté SIIC, la proportion est moindre (3% des actifs sous gestion fin 2017), mais elle a fortement progressé puisqu’elle n’en représentait que moins de 1% un an plus tôt. Enfin, les hôtels ne sont présents qu’à hauteur de 1,6% des patrimoines des SCPI. Mais certaines sont plus engagées que d’autres. On peut citer Atream Hotels (Groupe Atream), avec 100% investis en actifs hôteliers – avec 70 % d’hôtels et 30 % de résidences de tourisme et d’affaires -, tout comme Foncia Cap’Hebergimmo (Groupe Foncia) et UFG Pierre & Vacances Conseil Immobilier Moselle (Groupe La Française REM). Logipierre 3 (Groupe Fiducial) est également très exposée, avec 95,4 % de son patrimoine investis sur le secteur hôtelier.
Propos recueillis par Frédéric Tixier
A propos de Stéphanie Galiègue
Stéphanie Galiègue est Directrice de la Recherche et des Études de l’IEIF. Elle dispose de plus de 20 ans d’expérience en matière d’analyse de données, de performance et de risque pour le compte des investisseurs institutionnels dans le domaine de l’immobilier et de la finance. En 2005, Stéphanie Galiègue rejoint IPD France comme Directrice des Etudes et de la Recherche avant d’être promue Directrice générale adjointe quelques mois plus tard. En 2011, elle devient Directrice générale d’IPD France & Europe du Sud et Administratrice. Elle a débuté sa carrière chez Axa Investment Managers Paris en 1996, où elle a développé une expertise particulière en matière d’analyse de performance et de risque, avant de rejoindre CDC Ixis Asset Management en 1999. En 2001, elle est devenue chez Deloitte, responsable de la ligne de service Reporting et Attribution de performance dans le pôle dédié à l’assistance aux sociétés de gestion. Stéphanie Galiègue est diplômée d’HEC, majeure Finance et membre du Cercle des Femmes de l’Immobilier.
A propos de l’IEIF
Créé en 1986, l’IEIF est un centre d’études, de recherche et de prospective indépendant spécialisé en immobilier. Son objectif est de soutenir les acteurs de l’immobilier et de l’investissement dans leur activité et leur réflexion stratégique, en leur proposant des études, notes d’analyses, synthèses et clubs de réflexion. L’approche de l’IEIF intègre l’immobilier à la fois dans l’économie et dans l’allocation d’actifs. Elle est transversale, l’IEIF suivant à la fois les marchés (immobilier d’entreprise, logement) et les fonds immobiliers (cotés : SIIC, REIT ; non cotés : SCPI, OPCI, autres FIA).
L’IEIF compte aujourd’hui plus de 120 sociétés membres (2/3 d’investisseurs, 1/3 d’autres acteurs : promoteurs, banques, experts immobiliers, conseils en immobilier, etc.). Le patrimoine immobilier des membres investisseurs représente une valeur globale de près de 300 milliards d’euros. L’IEIF s’appuie sur une équipe de 20 personnes issues à la fois des mondes de la finance et de l’immobilier, dont 6 chercheurs associés. Il dispose de nombreuses bases de données économiques, financières et immobilières, dont certaines ont plus de 30 ans d’historique.