Une interview de Gilbert Rodriguez, Président d’Inter Gestion
Le dirigeant de la société de gestion de SCPI Inter Gestion propose un dispositif simple permettant à tous les contribuables français d’investir avec un montant limité à 30 000 euros par an.
Vous portez un constat d’échec sur les incitations fiscales en faveur de l’investissement en immobilier résidentiel des particuliers. Pourquoi ?
Bon, mal an les particuliers acquièrent 50 à 60 000 logements neufs dans le but de les mette en location. C’est bien peu au regard des dispositifs fiscaux qui se sont succédés depuis 20 ans. Sans compter qu’une bonne partie de ces acquisitions –peut-être 20 à 30 000 – auraient vu le jour sans aucune incitations fiscales comme c’était le cas avant la création de ces dispositifs en faveur de l’investissement locatif. Cet effort des particuliers n’a pas compensé le retrait des acteurs institutionnels au cours des deux dernières décennies. Cet état de fait met en évidence les limites d’un système organisé autour d’un avantage fiscal toujours créé en vue d’inciter directement les investisseurs particuliers dans une démarche individuelle.
Vous appelez donc à un retour des investisseurs institutionnels sur le marché résidentiel ?
S’il apparaît souhaitable que les acteurs institutionnels reviennent vers le logement, il faut leur en donner les moyens. Parmi ceux-ci, les sociétés de gestion de SCPI peuvent jouer un rôle central. Les SCPI offrent une gestion immobilière sécurisée par le professionnalisme des équipes de gestion et la mutualisation de leurs investissements. Leurs opérations immobilières se révèlent également plus efficaces pour la collectivité dans la mesure où la taille de leurs investissements permet de répondre à des objectifs en phase avec l’intérêt général. Des opérations de taille permettent d’intégrer des équipements collectifs, de segmenter l’offre en intégrant des logements sociaux, intermédiaires et du secteur libre, et de favoriser la mixité des bâtiments. Enfin, Les sociétés de gestion de SCPI sont mieux à même de répondre aux exigences du marché locatif en construisant là où les besoins sont les plus manifestes. Ce qui éviterait les opérations dont la motivation réside davantage dans la logique de réseaux commerciaux peu scrupuleux plutôt que la vente d’actifs patrimoniaux solides et adaptées à une réelle demande.
Vous faites allusions à des scandales qui ont défrayés l’actualité.. .
Le particulier est trop souvent sollicité par des opérations sans vraies justifications économiques. Et quand les biens acquis sont situés dans des zones où la demande est forte, on constate que les investissements bénéficiant d’incitations fiscales à destination des investisseurs particuliers, le prix payé par ces derniers est significativement majoré par rapport au prix du marché.
Sous quelle forme le gouvernement doit-il orienter ses incitations fiscales ?
Vers l’épargne collective investie en immobilier résidentiel neuf ! Reprenons tout simplement les recettes du Monory qui avait ramené les français vers la Bourse dans les années 70. Les contribuables qui investissaient 5000 francs dans une sicav investie en action françaises se voyaient accorder une remise d’impôt sur le revenu égale au quart de leur investissement. Pour que ça marche il faut ouvrir au maximum cet avantage fiscal. Je propose un avantage fiscal 10 fois plus faible que celui d’aujourd’hui avec un montant de souscription de 30 000 euros avec l’obligation de conserver les parts acquises pendant 9 ans. L’avantage fiscal serait par contre imputable sur les revenus de l’année de la souscription. Ce dispositif ouvert au plus grand nombre, y compris aux ménages n’ayant pas les moyens d’acheter un logement, permettrait de changer de dimension l’enveloppe des constructions neuves résidentielles. Si on peut raisonnablement fixer un objectif de 5 milliards d’euros la première année, un montant de 10 milliards d’euros en vitesse de croisière est très raisonnable.
N’y a-t-il pas un danger inflationniste sur le prix des logements ?
Certainement moins que lorsque l’avantage fiscal est donné à des investisseurs particuliers. Les sociétés de gestion examinent en effet le marché locatif sous tous ses aspects, notamment en fonction des niveaux de loyers à attendre dans le secteur visé. Les fonds travaillent en amont avec les promoteurs dans le choix des terrains. Mais vous avez raison il convient de se méfier des fonds opportunistes à la recherche de dispositif fiscaux. Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer dans les agréments donnés aux acteurs en charge de la collecte de cette épargne foncière. L’agrément des programmes d’activité de l’autorité des Marchés Financiers (AMF) doit prendre en compte l’historique des réalisations des sociétés de gestion. La spécialisation dans les SCPI investies dans le logement est peu répandue. A peine une douzaine d’acteurs se partagent un modeste marché qui ne représente que 10 % de la collecte de 27 milliards du secteur. Les gérants de SCPI de logement ont acquis la capacité pour remplir cette mission et gérer un avantage fiscal qui serait pour la première fois consenti spécifiquement à l’épargne collective immobilière, alors que jusqu’à présent les SCPI n’ont eu à se contenter que des miettes des dispositifs accordés aux particuliers. En 2011, 624 millions d’euros ont été collectés par les SCPI fiscales investissant dans le logement ne leur permettant que de financer 3500 appartements.
Propos recueillis par Christophe Tricaud