Les résultats de la foncière spécialisée dans la logistique sont meilleurs que prévu. L’actif net réévalué progresse fortement. L’année 2015 signera l’arrivée à maturité du patrimoine qui atteindra le milliard d’euros, alors que la croissance va ralentir. Argan donne la priorité au désendettement.
Les résultats annuels de la société d’investissement immobilier coté (SIIC) Argan sont venus conforter un joli parcours boursier qui a vu le titre s’apprécier de 36 % en 2014 (15 points de mieux que l’indice IEIF des SIIC). Le bénéfice net de 2,90 euros par actions (40,8 millions d’euros) a même porté le cours de Bourse vers un nouveau sommet de 20,20 €, avant que n’interviennent quelques prises de bénéfices à la veille du week-end.
La société doit aujourd’hui faire face à deux challenges. Le premier consiste à expliquer pourquoi la part de son résultat net distribué (32 %) reste si faible et conduit à un rendement du titre de seulement 4,2 % sur la base d’un cours de 20,20 €, très en deçà de ce qu’offre ses concurrents du secteur des foncières (5,6 %). L’autre défi qui se pose à Argan tient à la gestion de son passif. Car la foncière spécialisée dans la logistique se distingue par un très fort effet de levier par la dette. Son ratio de dette rapportée à la valeur du patrimoine (LTV) s’établit à 69,3 %. Du coup le coût de cette dette reste élevée à 3,45 % (conte 3,52 % à la fin 2013) ne bénéficiant que très légèrement de la détente des taux qui a fait les choux gras du secteur en 2014. Pire encore lorsque la société s’est tournée vers le marché obligataire en levant 65 millions d’euros il lui a fallu concéder un coupon de 5,5 %. La prise de conscience est rude quoique la foncière soit bien plus vertueuse que ses concurrentes puisque 90 % de sa dette est amortissable et seulement 10 % remboursable in fine. C’est d’ailleurs de ce choix pour le remboursement du capital tout au long de la durée de l’emprunt que se trouve la faible rémunération des actionnaires. Car chaque année la société crée de la valeur en remboursant sa dette à raison de près de 2 % par an. Ce que les actionnaires ne perçoivent pas en dividende ils l’obtiennent mécaniquement par la hausse de la valeur d’actif net réévalué (ANR). A la fin 2014, l’ANR par action d’Argan s’établit à 17,60 euros hors droits et à 20,50 euros droits compris. Il n’était que de 16 euros hors droits un an plus tôt. Il a été boosté par 1,80 euros du résultat 2013 non distribué aux actionnaires, alors que les experts valorisant le patrimoine en abaissant leur taux de capitalisation des loyers à 7,65 % contre 7,70 % un an plus tôt ont permis d’enrichir cet ANR de 30 centimes par action. La hausse de l’ANR due au désendettement alimentera donc la progression de l‘ANR à hauteur de près de 2 euros par an jusqu’en 2020 selon nos calculs, date à laquelle les dirigeants entendent ramener le ratio LTV à 60 %
Pour se convaincre un peu plus de la création de valeur chez Argan on peut s’attarder sur la rentabilité des capitaux propres qui dépasse 16 % quand ses confrères voient rarement la leur passer le cap des 10 %.
Du côté de l’exploitation de ces plateformes logistiques, de ce groupe intégré qui construit la plupart de ses actifs, se déroule sans à-coups. Le taux de vacance financière du patrimoine s’est maintenu à 2 % grâce aux efforts entrepris à l’égard des locataires se plaignant d’un loyer trop élevé. Le groupe estime qu’en moyenne ses loyers restent supérieurs aux loyers de marché de l’ordre de 6 %, mais il semble gérer ce risque sans trop de mauvaises surprises à attendre.
De sorte que l’accession à la maturité d’Argan qui va rompre avec une forte croissance de son patrimoine dans les prochaines années pour se consacrer à son désendettement ne remet pas en cause la progression de ses résultats (+ 20 % à 36,7 millions d’euros du résultat net récurrent en 2014) et de l’ANR. Pour 2015 Argan révise en hausse son objectif d’ANR à 19,40 euros par action hors droit et à 22,50 euros droits compris. Les loyers devraient passer de 66,2 millions à 68 millions sous l’effet en année pleine des investissements livrés en 2014. A la fin de l’année la valeur du patrimoine passera le cap du milliard d’euros (914 millions à la fin 2014), avec près de 40 millions d’investissements réalisés au cours de l’exercice. A noter qu’un signal fort pourrait venir d’une nouvelle émission obligataire… réalisée cette fois à un taux proche de 4 %.
Christophe Tricaud
pierrepapier.fr