Quel rapport entre les SCPI et fonds immobiliers, et le décret tertiaire ?
Les SCPI et les fonds immobiliers, on le sait, prennent un soin particulier à la performance énergétique. Une moindre consommation rend les immeubles plus attrayants pour les locataires, qui subissent moins de charges. Et participe de l’effort collectif vers une économie moins coûteuse en énergie, dans une vision de développement durable.
Mais il y a aussi un cadre réglementaire, le « décret tertiaire ». Explications.
Le décret tertiaire, qu’est-ce que c’est ?
Quelques définitions :
- Le décret tertiaire concerne la mise en pratique des grandes directives établies par la loi ELAN de 2018.
- En effet la loi ELAN (Évolution du Logement, de l’Aménagement et du Digital) inclut les bâtiments tertiaires
- On définit un « bâtiment tertiaire » comme un lieu clos et couvert pouvant être chauffé, climatisé ou ventilé, dans lequel se déroule une activité tertiaire (hors résidentiel ou industriel). Il englobe donc une diversité de bâtiments tels que les bureaux, les commerces, les établissements d’enseignement, les hôtels et les centres de santé.
- L’ADEME est l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie.
Le décret tertiaire impose des objectifs clairs et ambitieux. Il a pour objet d’obliger les bâtiments à réduire drastiquement leur consommation (électricité, gaz, chauffage, climatisation). Il fixe des chiffres et des objectifs précis.
Le décret tertiaire pour la réduction de consommation
Le décret propose deux approches, l’une en valeur relative, l’autre en valeur absolue.
Réduire progressivement la consommation des immeubles : objectif relatif
Pour cette première approche, une année de référence est choisie entre 2010 et 2019, incluant tous les usages énergétiques sur l’année. La consommation est ajustée en fonction des variations climatiques. A partir de cette donnée, la réduction doit être de 40% en 2030, 50% en 2040 et 60% en 2050.
Nouveautés de fin 2024 :
- L’article 4 de l’arrêté du 20 février 2024 et les précisions de l’ADEME en octobre 2024 établissent une distinction entre période de référence et année de référence.
- La période de référence (2010-2019) sert de base de consommation sur la dernière décennie. On ne déclare qu’une seule année de consommation.
- La plateforme OPERAT (Observatoire de la Performance Énergétique de la Rénovation et des Actions du Tertiaire) détermine automatiquement l’année de référence parmi l’année de consommation déclarée dans la période de référence (2010-2019), ainsi que 2020, 2021 et 2022. C’est elle qui est utilisée pour fixer l’objectif en valeur relative.
- La plateforme OPERAT examine aussi les années 2020, 2021 et 2022 et retient l’année permettant d’atteindre l’objectif relatif de réduction le plus élevé.
- Pour les bâtiments exploités après 2022, la première année pleine d’exploitation devient l’année de référence.
- Nouveau délai : les gestionnaires ont jusqu’au 30 septembre 2027 pour déclarer leurs données. Après cette date, OPERAT attribuera automatiquement une année de référence.
Quand un bâtiment est déjà économe en énergie : objectif absolu
Si un bâtiment est récent ou s’il consomme peu, on peut difficilement réduire sa consommation de 50% ! Le décret tertiaire prévoit donc de suivre, dans ce cas, une valeur absolue, donc un seuil à respecter exprimé en kWh/m²/an, compte tenu de l’intensité d’usage énergétique nécessaire pour le secteur d’activité. Un arrêté définit cette valeur selon la typologie du bâtiment. La valeur absolue tient compte de l’altitude et de la position géographique.
Le décret tertiaire autorise des cas particuliers
Des contraintes économiques, techniques, architecturales ou patrimoniales peuvent faire obstacle à l’atteinte des objectifs pour chaque décennie. Il est alors possible de modifier l’objectif absolu de consommation en construisant un dossier de modulation. Ce mécanisme permet de définir des objectifs adaptés, plus facilement atteignables que les objectifs initiaux. L’objectif relatif peut alors s’en trouver lui aussi modifié en proportion.
Les dossiers de modulation doivent être déposés sur OPERAT avant le 30 septembre 2027. Une étude énergétique est alors obligatoire.
Le décret tertiaire concerne quels immeubles ?
- D’abord les bâtiments existants ou neufs d’une surface supérieure ou égale à 1 000 m² exclusivement allouée à un usage tertiaire ;
- Ensuite toutes parties d’un bâtiment à usage mixte qui hébergent des activités tertiaires et dont le cumul des surfaces est supérieur ou égal à 1000 m² ;
- Enfin tout ensemble de bâtiments situés sur une même unité foncière ou sur un même site dès lors que ces bâtiments hébergent des activités tertiaires sur une surface cumulée supérieure ou égale à 1 000 m².
- Exceptions : les constructions précaires, les lieux de culte et le secteur de la défense.
Concrètement…
Précisons plusieurs aspects :
- La plateforme OPERAT recense la consommation d’énergie des bâtiments. Chaque gestionnaire doit y inscrire ses données de référence.
- Des aides financières et dispositifs d’accompagnement existent pour soutenir les démarches engagées.
- Des risques et sanctions font partie du dispositif : amendes, « naming and shaming » (publication des contrevenants sur une plateforme publique), objectifs plus stricts en cas d’année de référence mal choisie.
Enfin, il faut savoir aussi que le recours à des professionnels qualifiés permet de sécuriser la conformité réglementaire (choix de l’année de référence, déclaration sur la plateforme OPERAT, élaboration éventuelle d’un dossier de modulation) et de transformer cette contrainte en levier stratégique.
SCPI, fonds immobiliers et décret tertiaire
À l’échelle du pays, le décret tertiaire constitue une étape clé pour les propriétaires et gestionnaires de bâtiments à usage tertiaire. Au-delà de l’obligation réglementaire, il représente une réelle opportunité. Améliorer la performance énergétique des bâtiments et réduire les coûts de fonctionnement. Renforcer l’image environnementale des entreprises et valoriser le patrimoine immobilier.
Par ailleurs, SCPI et fonds immobiliers savent que leurs investisseurs et épargnants attendent une approche volontariste dans le domaine de la qualité environnementale
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Jacques Montagne a co-fondé Alter Watt