Le président de la nouvelle société de gestion qu’il vient de lancer avec David Seksig détaille la philosophie de gestion de son premier véhicule, la SCPI Remake Live. Il livre, plus globalement, sa vision des marchés de la distribution des produits immobiliers. Et des objectifs sociétaux que ces derniers, selon lui, devraient remplir. Interview.
Pourquoi Remake ? En référence à une « nouvelle version » de Neo, cette SCPI que vous avez lancée il y a maintenant plus de deux ans, chez Novaxia ?
Nicolas Kert – C’est surtout l’illustration de notre volonté de revisiter, de recréer, et d’améliorer les produits d’épargne immobilière, dont la version existante de la SCPI. Notamment sur le sujet des droits d’entrée, comme nous l’avons déjà fait. La SCPI est un véhicule d’investissement dont les contours ont assez peu changé depuis les années 60, même si le produit s’est adapté au fil du temps. Mais pas suffisamment à notre sens. D’ailleurs, en dépit de son succès actuel, la SCPI ne représente encore qu’une très faible partie de l’épargne en France. A peine 2%. Notre ambition, c’est de la propulser beaucoup plus largement, de la reformater, afin qu’elle puisse s’intégrer plus massivement au sein des supports d’épargne.
Remake Live sera distribuée exclusivement via des réseaux de distribution. Pourquoi ne pas avoir proposé aussi, comme d’autres gestionnaires de SCPI sans frais d’entrée, la souscription en ligne directement par les investisseurs finaux ?
Nicolas Kert – Le modèle de la SCPI sans frais d’entrée n’est pas, selon nous, un modèle nécessairement associé à un mode de distribution B to C. Plusieurs sociétés de gestion, qui ne pratiquent pas le zéro commission à l’entrée, obtiennent d’excellents résultats en souscription directe. Ce qui démontre bien que le succès de ce mode de distribution n’est pas lié à la structure de frais du véhicule. Mais davantage à sa performance. Notre positionnement est, parce que nous croyons aux vertus du conseil, clairement et exclusivement B to B. Avec une cible de distribution prioritaire : l’assurance-vie. Proposer une SCPI sans frais d’entrée logée au sein d’un contrat d’assurance permet en effet d’aligner les intérêts des trois parties prenantes.
C’est-à-dire ?
Nicolas Kert – Ceux du souscripteur, d’abord, qui ne subit pas de décote immédiate sur la valeur de son investissement. Et reste donc libre d’arbitrer, à moindre frais, son placement s’il n’en est pas totalement satisfait. Et ceux, ensuite, des assureurs et des réseaux de conseils en gestion de patrimoine. Les assureurs y gagnent en satisfaction client, n’étant plus obligés de justifier l’écart important entre le prix de souscription et la valeur de rachat. Les réseaux capitalisent eux aussi sur la satisfaction de leurs clients, et bénéficient d’un mode de rémunération plus simple, basé sur les encours sous gestion. A l’instar de la quasi-totalité des autres formules de placement en immobilier (SC, OPCI), ou financières tels que les OPCVM.
Vous avez fait le choix de constituer une société de gestion indépendante pour lancer Remake Live. Proposer un véhicule sans droit d’entrée au sein d’une structure existante, c’est mission impossible ?
Nicolas Kert – Ce choix de l’indépendance est murement réfléchi. Avec David Seksig, nous sommes aujourd’hui convaincus, compte tenu de nos expériences respectives, que le lancement d’un produit disruptif au sein d’une société de gestion déjà établie est très compliqué. Quelle que soit la taille de cette société, la cohabitation entre des véhicules construits selon des structures de frais différentes brouille le message envers les distributeurs. D’ailleurs, l’histoire démontre que ce ne sont pas les acteurs traditionnels, quel que soit le secteur, qui ont porté les changements. Mais les pure players. Et notre ambition est bien de devenir un acteur incontournable dans la gestion de solutions immobilières grand public dans les prochaines années.
Avec, si j’ai bien compris, un tropisme social et sociétal là aussi pleinement assumé ?
Nicolas Kert – Là encore, notre expérience nous conduit à penser qu’en dépit de leur volonté de se transformer, qu’en dépit des procédures mises en place pour y parvenir, les acteurs traditionnels, surtout ceux d’une certaine taille, auront beaucoup de mal à s’adapter et à mettre en œuvre une véritable démarche ESG. Parce que cette démarche révolutionne véritablement l’organisation d’une entreprise. Notre choix d’intégrer, dès l’origine, une approche dite inclusive, et de l’inscrire au centre de nos processus de gestion, est le fruit de ce constat. Mais il est aussi, et avant tout, un choix sincère en phase avec nos convictions.
Comment concilier cette approche inclusive et la rentabilité financière promise ?
Nicolas Kert – Le fait de décider que de 5% à 10% des fonds collectés seront investis dans la nue-propriété de logements sociaux aura clairement un impact sur le rendement. Mais nous raisonnons sur le long terme. Ce renoncement à une partie des rendements, à court terme, pourrait en effet fort bien être compensé, à terme, par des plus-values réinvesties dans ce dispositif. Le choix de concentrer nos investissements en périphérie des grandes métropoles résulte de cette même logique de projection inclusive. Ces territoires sont en devenir. Les actifs immobiliers qui s’y trouvent offrent donc à la fois des rendements plus élevés que ceux situés au centre des grandes agglomérations. Et des perspectives de plus-values, à terme, plus importantes.
Un positionnement qui va donc à l’encontre des stratégies de « flight to quality » ?
Nicolas Kert – Quelle est l’utilité sociétale d’une SCPI qui investit uniquement sur les Champs-Elysées parisiens ou sur le Kurfürstendamm berlinois ? Nous pensons que le rôle des investisseurs de long terme est, au contraire, d’accompagner dans leur mutation des territoires susceptibles d’intégrer les grandes métropoles. C’est d’ailleurs ce qu’on fait la plupart des premières SCPI dans les années 1980, au profit de la petite couronne parisienne par exemple. Raison pour laquelle elles disposent aujourd’hui d’un patrimoine recelant d’importantes plus-values. Mais elles ont tendance à l’oublier…
Pour mener une stratégie de long terme, il faut une base financière solide. De quels moyens disposez-vous ?
Nicolas Kert – Le capital de Remake Asset Management est majoritairement détenu par les deux fondateurs, David Seksig et moi-même. Mais là n’est pas l’essentiel. Remake Live, avant même son lancement, s’est assurée du soutien de plusieurs investisseurs. 20 M€ ont déjà été collecté auprès des membres fondateurs, assureurs, distributeurs ou clients privés. Ce qui nous a permis de réaliser nos premières acquisitions. Dont des immeubles de bureaux. 30 M€ supplémentaires, en provenance d’un acteur institutionnel, attendent d’être convertis en capital. Ils seront appelés au fur et à mesure de la signature des prochains actifs. Ce qui évite la dilution des associés actuels. Avec 50 M€ d’engagement au total, Remake Live dispose donc d’un niveau de seed money rarement atteint…
Combien espérez-vous collecter sur 2022 ?
Nicolas Kert – Nous visons une capitalisation, en fin d’année, d’une centaine de millions d’euros.
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A propos de Remake Asset Management(i)
Remake est une société de gestion indépendante agréée par l’AMF en 2021, au capital social initial d’un 1,2 million d’euros. Nouvel acteur dans les solutions d’investissement en immobilier destinées au grand public, Remake se différencie par sa vision de l’épargne comme un vecteur majeur de la mutation des territoires périurbains, et par son ambition sociale. En conciliant valeur financière et utilité sociale, Remake souhaite devenir un acteur de référence de l’épargne immobilière responsable.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société