Louis Martial, directeur général adjoint de Consultim AM, est l’invité des « Acteurs de la pierre- papier ». Le marché des actifs immobiliers de petite taille est-il aujourd’hui plus liquide que l’ensemble du marché des transactions ? Plus dynamique ? Comment expliquer la poursuite du mouvement de baisse de parts de certaines SCPI ? Questions. Réponses.
Vous gérez une SCPI lancée il y a maintenant 4 ans, Optimale, qui, on y reviendra, investit essentiellement sur des actifs immobiliers de petite taille, en France. Première question, donc : ce marché de l’immobilier « small caps » est-il aujourd’hui moins -ou plus ?…- grippé que celui des grands actifs, plus international ?
Louis Martial – Bonne question. Ce marché « small caps » passe traditionnellement un peu sous les radars. Mais il a retrouvé un peu d’éclat depuis la crise des taux, et des problèmes de liquidité qu’elle a engendrés. Quelques chiffres. Les actifs « small caps » -au sens d’Optimale, c’est-à-dire d’une valeur unitaire inférieure à 10 M€- représentaient 7% du marché en 2021. Une proportion qui a grimpé à 13% en 2023…
13% des transactions…
Louis Martial – Des transactions, exactement. Et si l’on va un peu plus loin, et que l’on intègre les opérations inférieures à 50 M€, les « small mid caps » sont devenues majoritaires en termes de transactions. Avec 55% du marché en 2023. Contre un peu plus de 30% seulement en 2021.
Plus de transactions, donc plus de liquidité. Mais est-ce parce qu’il y a plus d’acheteurs ? Parce qu’il s’agit d’actifs de qualité ?
Louis Martial – Pas « plus de transactions », en fait, puisque les volumes globaux sont en baisse. De presque 50% par rapport à 2021. Mais c’est effectivement une classe d’actifs qui gagne des parts de marché. Parce que ces actifs de petite taille sont par nature plus liquides, plus faciles à arbitrer ou à acquérir. Ce qui prend une importance toute particulière dans un contexte où l’argent est difficile à obtenir. Or, on le sait, il y a désormais des problèmes de collecte pour les SCPI. Des problèmes pour obtenir des financements, pour s’endetter, compte tenu de l’attitude des acteurs bancaires aujourd’hui. Les « small caps » sont donc une classe d’actifs qui résiste mieux, du fait de sa capacité à se négocier plus facilement.
Léger mieux, donc, pour le segment « small caps ». Quid du reste du marché ? Les chiffres du 1er semestre ne sont pas enthousiasmants. Pourtant, les acteurs évoquent un phénomène d’atterrissage. Partagez-vous ce sentiment ?
Louis Martial – Je rappelle d’abord les chiffres du 1er semestre sur le segment des small et mid caps. Les premières (moins de 10 M€) ont capté 11% du marché. Les secondes (moins de 50 M€), 49%, soit quasiment la moitié du marché. Ma remarque précédente reste donc d’actualité. Concernant le marché, au sens large, je ne pense pas qu’il soit réellement en phase de reprise. Le premier semestre, c’est effectivement un peu moins de 6 Md€ transactés. Un montant très inférieur aux moyennes décennales. Pour mémoire, cette moyenne, pour une année entière, est de l’ordre de 30 Md€… L’année 2024 devrait a priori s’achever sur un volume inférieur à celui atteint en 2023. Lui-même de 50% inférieur à l’année précédente…
La reprise n’est pas actée… Cette dichotomie entre small et large caps, elle se retrouve aussi en quelque sorte sur le marché des fonds immobiliers. D’un côté, les grosses -et vieilles- SCPI qui souffrent. De l’autre, les petites -et jeunes- SCPI qui, pour la plupart, continuent de collecter. Et ne sont pas contraintes de baisser le prix de leurs parts. A l’inverse des grandes SCPI historiques, dont les annonces se sont de nouveau multipliées depuis la rentrée. Vous attendiez-vous à cette nouvelle vague de baisse ?
Louis Martial – Oui, et non. Certes, lorsque l’on regarde les niveaux de valorisation des SCPI, comparés à ceux de l’immobilier en direct, ou à l’immobilier coté, ces niveaux se sont ajustés. Les prix de parts ont diminué. Mais peut-être moins diminué que les valorisations de l’immobilier en direct ou l’immobilier coté.
Je rappelle, par exemple, que les valeurs de l’immobilier de bureau en direct, c’est 50% de baisse. Ce qui n’a pas été le cas pour le prix des parts des SCPI…
Je confirme : -34% pour la plus forte baisse cumulée pour une SCPI…
Louis Martial – Voilà pourquoi ces nouvelles baisses ne m’étonnent pas totalement. Elles m’étonnent néanmoins dans la mesure où nous sommes entrés dans une nouvelle période. Où la visibilité, tout du moins sur les taux d’intérêt, est nettement meilleure. Je rappelle : deux baisses de taux au niveau européen ; une baisse aux Etats-Unis. Donc, la « crise » des taux est a priori derrière nous. Ce qui devrait être positif sur les valorisations, sachant que certains actifs immobiliers sont très sensibles aux taux. Mais, finalement, on s’aperçoit que certains acteurs continuent de déprécier leurs patrimoines. Est-ce un effet d’inertie ? Et donc les derniers effets de la crise… Ou est-ce le signe d’autres « sujets » ? Comme par exemple une problématique sur l’usage de certains actifs, dont la valeur va continuer à décroitre…
On pense aux bureaux, notamment, puisque ce sont essentiellement des SCPI « bureaux » qui ont baissé les prix de leurs parts, je le rappelle…
Louis Martial – Tout à fait. Cela peut donc être révélateur d’une problématique d’usage. Peut-être s’agit-il aussi d’acteurs qui continuent à anticiper, ou qui ont des démarches on va dire…
Opportunistes ? Qui cherchent, peut-être, tout simplement à relancer leur collecte…
Louis Martial – Effectivement…
Propos recueillis le 23 septembre 2024 – Suite de l’entretien à paraître dans un prochain article.
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- Information extraite d’un document officiel de la société.