Oussama Bourhaleb, cofondateur et président de Darwin, analyse les critères de réussite sur le marché des SCPI. La construction d’un track record et l’engagement de s’inscrire dans la durée sont des facteurs essentiels. Mais pas que… Interview
Frédéric Tixier — De nombreux lancements de SCPI sont intervenus ces derniers mois et ces dernières années. Comment expliquez-vous cet engouement — y compris le vôtre — pour ce marché, alors que les marchés immobiliers sous-jacents demeurent tendus, et que l’on observe, il faut bien le reconnaître, un effondrement de la collecte en SCPI ?
Lancer une SCPI sans stock immobilier hérité, un avantage décisif
Oussama Bourhaleb — Mon analyse est la suivante : nous sommes plusieurs professionnels de l’immobilier — car, pour créer une société de gestion, il faut obtenir un agrément, ce qui implique d’être un professionnel du secteur — à considérer qu’il existe aujourd’hui une excellente opportunité de se développer sur des actifs de type SCPI. Pour offrir du rendement. Mais sans avoir de stock immobilier préexistant… Lequel présenterait un risque important de dévaluation depuis la hausse des taux d’intérêt. Aujourd’hui, pour l’investisseur final, nous pensons donc qu’il s’agit d’un très bon investissement. Cependant, le marché s’est effectivement contracté. Ce qui signifie que l’intensité concurrentielle en matière de collecte s’est accrue. Et que nous sommes beaucoup plus nombreux à nous battre pour une part du gâteau qui s’est réduite.
Frédéric Tixier — Il n’y a donc pas forcément de la place pour tout le monde…
Durer, développer un track record, ne pas survendre : les clés du succès à moyen terme ?
Oussama Bourhaleb — Ma conviction est, qu’à moyen terme, ceux qui perdureront seront ceux qui disposent d’une capacité à : premièrement, tenir dans la durée, deuxièmement, développer un track record solide, et, troisièmement, à ne pas survendre leurs produits… Car nous évoluons de fait sur un marché où de nombreux acteurs ont tendance à survendre quelque peu leurs promesses.
Frédéric Tixier — En termes de rendement, notamment.
Oussama Bourhaleb — Exactement.
Frédéric Tixier — Justement, certains nouveaux entrants réussissent remarquablement bien —en levant plusieurs dizaines de millions d’euros en quelques mois —, tandis que d’autres peinent à décoller. Et ce n’est pas uniquement une question de rendement…. Selon vous, quels sont les facteurs clés de succès ?
Oussama Bourhaleb — En toute humilité, nous sommes passés de zéro à 15 millions d’euros en une dizaine de mois, ce qui, pour des entrepreneurs qui démarrent n’est pas si mal…
L’importance de la marque sur le marché des SCPI
Frédéric Tixier — Il y en a d’autres qui ont collecté 20 millions en une seule journée….
Oussama Bourhaleb — Oui effectivement. Mais si nous prenons l’exemple de ce concurrent, il disposait déjà d’une société de gestion établie. Avec une SCPI ayant développé un track record. Or aujourd’hui, dans un environnement où règne un bruit médiatique considérable —dans ce métier, l’actualité est intense, avec quotidiennement des événements et de la communication —, ce qui compte véritablement, c’est bien la marque et le track record. Concrètement, cela prend du temps. Nous estimons que cela peut nécessiter deux à trois ans avant de porter ses fruits….
Frédéric Tixier — Mais les conseillers en gestion de patrimoine acceptent-ils de vous recevoir ? Car ils sont tellement sollicités par d’autres sociétés de gestion…
Les CGP recherchent la diversification des gérants de SCPI
Oussama Bourhaleb — Oui, les CGP nous reçoivent. Car ils partagent tous ce même principe : il est important de diversifier. Non seulement en termes de SCPI — qui sont elles-mêmes diversifiées —, mais également en termes de gérants. Car un gérant représente aussi potentiellement un risque pour l’investisseur final. Aujourd’hui, nous parvenons donc à entrer dans des allocations où, aux côtés de nos produits, figurent des SCPI d’Arkea REIM ou d’Iroko. Nous représentons donc en fait une poche de diversification. Et nous en sommes très satisfaits. Pourquoi ? Parce que notre objectif premier est de construire une marque. Et, que cela prenne trois ans, cinq ans ou dix ans, nous serons toujours présents sur le marché. Parce que c’est notre entreprise, et que nous sommes des entrepreneurs. Nous ne sommes pas des salariés qui pourraient se dire : « si cela ne fonctionne pas, j’irai chez le concurrent… ».
S’engager à réussir
Frédéric Tixier — C’est un argument qui porte ?
Oussama Bourhaleb — C’est en tout cas l’engagement que nous prenons auprès de nos investisseurs : vous investissez auprès de personnes pour qui il s’agit de leur propre entreprise. Ils ont donc besoin que cela réussisse…. C’est d’autant plus important lorsqu’il s’agit du premier fonds. Car, généralement, ce premier fonds s’avère l’un des plus performants. Sous réserve, bien entendu, que certaines conditions soient réunies. Mais, en principe, c’est ce premier fonds qui incarne l’image de marque de la société de gestion…
Frédéric Tixier — L’engagement consiste donc à se différencier, à s’inscrire dans la durée, et à jouer sur la diversification nécessaire à tout portefeuille de qualité….
Des outils digitaux dédiés aux CGP pour se différencier
Oussama Bourhaleb — Exactement. Ensuite, troisième point très concret : nous disposons en interne de personnes issues de la tech et d’autres provenant de l’immobilier. Nous développons donc actuellement de manière active des services dédiés aux CGP. Premier service : un simulateur en marque blanche. Le CGP a ainsi la possibilité de disposer d’un outil d’aide à la vente. Grâce auquel il peut réaliser une simulation pour son client, avec sa propre identité visuelle, puis l’exporter au format PDF et l’envoyer au nom de son cabinet. La deuxième initiative que nous développons est « Darwin Communauté ». Il s’agit de permettre à un CGP indépendant — car aujourd’hui, notre clientèle se compose en grande partie d’indépendants — de poser des questions techniques. Il est alors accompagné par un notaire, un avocat ou un expert-comptable, des professionnels en mesure de l’orienter et de l’accompagner dans sa prise de décision.
Le résidentiel géré étudiant, un marché en plein essor
Frédéric Tixier — Des outils digitaux, donc. Je souhaitais également profiter de votre expérience sur le marché du résidentiel géré. Quelle est votre analyse de ce marché, aujourd’hui ?
Oussama Bourhaleb — C’est un marché en plein essor, notamment dans le segment étudiant. Nous constatons aujourd’hui d’importantes transactions — JP Morgan se développe dans ce secteur, Northwood également- . Il me semble qu’environ 3 milliards d’euros ont été investis en France sur le student housing au cours du premier semestre. C’est donc un phénomène remarquable, c’est LE marché à suivre.
Frédéric Tixier — Même au niveau européen, la croissance est explosive…
L’internalisation de l’exploitation, nouveau modèle du résidentiel géré
Oussama Bourhaleb — Exactement. Il s’agit d’un marché en plein essor, caractérisé par un modèle assez atypique où l’opérateur et le propriétaire — c’est-à-dire l’exploitation et les murs — sont regroupés au sein de la même société. C’est aujourd’hui le modèle qui se développe. Il s’agit de structures « OPCO-PROPCO[1]», comme nous les appelons dans le jargon, qui sont internalisées. Nous observons aujourd’hui que les professionnels de la finance se disent qu’il ne suffit plus de se positionner sur un immeuble. Mais qu’il faut disposer d’un savoir-faire spécifique pour pouvoir le gérer efficacement. Par conséquent, ils procèdent également au rachat de la société d’exploitation de ces actifs…
Propos recueillis le 16 octobre 2025
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A propos de Darwin(i)
Darwin est une société de gestion de portefeuille spécialisée dans l’épargne immobilière, agréée par l’AMF depuis le 23 juillet 2024. Alliant expertise, technologie et impact environnemental, Darwin propose des produits qui réinventent la ville tout en visant des performances durables. Certifiée B-Corp et membre de « 1% for the Planet », Darwin s’engage à offrir des solutions d’investissement responsables et innovantes.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.
[1] NDLR – OPCO-PROPCO est un modèle de structuration financière et immobilière qui sépare PROPCO (Property Company) – la société propriétaire des actifs immobiliers (les murs, le foncier) – et OPCO (Operating Company) – la société d’exploitation qui gère l’activité opérationnelle dans ces bâtiments-.
 
									 
					 

