La retraite en France fonctionne par répartition ? Faux. L’allongement de la durée de vie est le principal problème du financement des retraites en France ? Non, il y en a aussi un autre. Les réformes se succèdent, salariés et indépendants ne savent plus trop à quelle sauce ils seront mangés, s’ils ont le droit de rêver à une belle retraite.
Essayons d’aller à l’essentiel
SOMMAIRE
- Comment fonctionne le système français des retraites ?
- Pourquoi toujours tenter de nouvelles réformes ?
- Qui finance les pensions de retraite ?
- L’épargne pourra-t-elle financer la retraite ?
- Ce ne sont pas les vieux qui m’inquiètent, mais les jeunes…
Bonjour,
La retraite, on en parle beaucoup. Mais je ne suis pas sûr qu’on en parle bien. Je ne suis pas sûr du tout qu’on mette l’attention sur ce qui compte vraiment.
Pour ne pas se tromper sur la retraite, il faut d’abord accepter de quitter le politiquement correct, et ensuite revisiter la question avec un œil neuf.
Vous êtes prêts ?
Comment fonctionne le système français des retraites ?
On dit souvent, répartition. C’est faux. Il y a trois systèmes de retraite en France.
- Le premier, c’est la sécurité sociale. La retraite dite « de base ». On fixe d’avance les prestations des retraités. Des cotisations prélevées sur les salaires financent le système. Et si la sécurité sociale ne parvient pas à l’équilibre, l’impôt interviendra pour combler son déficit. Ce n’est pas un système par répartition, mais un système public.
- Ensuite vient le système par répartition, celui des retraites complémentaires et retraites des cadres. Là, on partage le gâteau : le montant total des cotisations donne le montant des prestations.
- Enfin viennent ce qu’on appelle les régimes spéciaux. Principalement la fonction publique, les grandes entreprises de service public, les collectivités locales. Les pensions de retraites sont fixées à partir de la carrière effectuée, et garanties. S’il n’y a pas assez d’argent, c’est encore l’impôt qui financera. Et comme il y a beaucoup de monde dans ces régimes, l’État est lourdement engagé, et les perspectives sont terribles.
Pourquoi toujours tenter de nouvelles réformes ?
Cela nous donne un premier éclairage, pourquoi les gouvernements successifs veulent absolument réformer les retraites ! Ah, les faux débats ! En réalité l’État français s’est fait déborder de deux façons :
- Par le régime de la sécurité sociale. L’allongement de la vie, une très bonne nouvelle en soi, alourdit l’engagement d’apporter des retraites décentes.
- Et par les régimes spéciaux. Personne n’avait anticipé au moment où on les a mis en place au lendemain de la guerre, il y a plus de soixante-dix ans, qu’il y aurait une telle croissance du personnel dans la fonction publique ou les grandes entreprises nationales.
Mais la répartition dans tout cela, les fameux régimes complémentaires des salariés et des cadres du secteur privé ? Certains prétendent qu’il aurait mieux valu construire des systèmes par capitalisation. Ceux-là n’ont pas de mémoire. Savez-vous pourquoi la France a choisi la répartition pour les salariés et les cadres ?
Tout simplement parce qu’en France nous avions, avant la seconde guerre mondiale, des régimes de retraite par capitalisation. Ils fonctionnaient bien. Puis, pendant la guerre, le gouvernement de Vichy, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, a tout pris. Fini, plus rien. Alors après la guerre, syndicats et patronat ont cherché ensemble un système dans lequel personne, pas même l’État, ne pourrait prendre dans la caisse. Un seul moyen : que l’argent aille directement, instantanément, de la poche de cotisant à celle du retraité. Et voilà la répartition ! Un système robuste, formidable en fait, s’il avait été le régime principal en plus de la pension de base de la sécurité sociale.
Donc évitons les faux débats. Ce n’est pas la répartition qui est en cause, mais les engagements de l’État, précisément en-dehors de la répartition.
Qui finance les pensions de retraite ?
Imaginons qu’après une réforme ou une autre on ait résolu les aspects de justice entre des régimes trop disparates. Le financement des retraites soulèverait encore une question importante : combien une économie moderne peut-elle consacrer à ses retraites ?
Après tout, peu importe le système exact. Pour le régime de base, il faut les cotisations de ceux qui travaillent. Pour les régimes complémentaires et des cadres, ce sont encore ceux qui travaillent qui vont les payer. De même pour les régimes spéciaux. Et s’il y avait un système par capitalisation, comme dans d’autres pays ? Eh bien les pensions viendraient de loyers d’immeubles, ou de dividendes d’actions, ou de revenus d’obligations. Mais d’où viennent les loyers, les dividendes, les revenus ? De l’activité, donc du travail.
Cela veut dire que le montant consacré à la retraite dépend directement de la prospérité d’une économie. Trop simple, oui, mais essentiel. Cela entraîne trois conséquences, qui devraient figurer dans tout débat sur la retraite.
Première conséquence. On peut parler des droits à la retraite, de la durée des cotisations, de carrières plus pénibles que d’autres. Et puis on peut parler aussi de l’âge du départ en retraite. Surtout, on peut mettre tout cela en perspective avec le merveilleux allongement de la durée de vie dont nous avons bénéficié. Mais à quoi serviront toutes les discussions et réformes si la puissance de l’économie se dérobe sous nos pieds ?
Le niveau des pensions de retraite dépendra finalement, et principalement, du dynamisme de l’activité en France. C’est là qu’il faudrait des objectifs, de la créativité, de l’enthousiasme ! On ne peut parler de la retraite des Français sans préparer la richesse de la France.
L’épargne pourra-t-elle financer la retraite ?
Deuxième conséquence. Même l’épargne individuelle, ou ce que certains appellent capitalisation, n’échappe pas à l’équation globale. Imaginons que de nombreux Français s’engagent dans un effort d’épargne important pour compléter leurs pensions apportées par les différents régimes. Peu importe que cette épargne aille vers l’immobilier, vers la Bourse, vers l’assurance-vie ou vers divers contrats d’épargne retraite. En fin de compte, ce sera l’activité économique qui apportera les revenus. Seule une bonne santé économique pourra financer et les pensions des régimes classiques et les revenus de l’épargne. « N’importe où ! N’importe où ! Pourvu que ce soit hors de ce monde » écrivait Baudelaire dans ses petits poèmes en prose.
Eh bien, le financement de la retraite, quel que soit l’équilibre entre régimes obligatoires et épargne individuelle, ne peut aller nulle part hors de l’économie.
Ce ne sont pas les vieux qui m’inquiètent, mais les jeunes…
Mais il y a une autre conséquence. Les retraités de demain, ce sont les adultes de demain qui les porteront, donc les jeunes d’aujourd’hui. Et que faisons-nous pour eux ? Les vraies réformes qui amélioreront les retraites, ce seront les réformes de l’éducation, de nos systèmes d’enseignement, de ce que nous inventerons pour permettre aux jeunes d’entrer dans des vies actives épanouissantes et réussies. C’est leur avenir que nous devons préparer.
Le cœur du débat sur les retraites, ce sont les perspectives des nouvelles générations.
Je vous souhaite une très, très bonne journée.
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