Plutôt que de lancer directement une augmentation de capital pour que SMA-BTP passe sous le seuil de 60 % du capital, comme le réclame le maintien du statut SIIC, Tour Eiffel émet des bons de souscription. Mais, à ce jour, la mutuelle n’est pas en mesure d’assurer qu’elle pourra respecter ce seuil au 5 mai 2015 au plus tard.
Conformément au scénario que nous développions le 4 mars dernier, Tour Eiffel lance une augmentation de capital au même cours que celui de l’OPA qui lui a permis d’obtenir 89,88 % du capital de la société d’investissement immobilier cotée (SIIC). Cependant, plutôt que de lancer directement son augmentation de capital, Tour Eiffel va procéder à l’émission de 6 351 181 bons de souscription (un bon remis à chaque action) pour tenter de lever 202,6 millions d’euros, soit 55 % des actions existantes. En effet, 20 BSA donneront le droit de souscrire à 11 actions nouvelles, moyennant un prix d’exercice global de 58 euros par action.
La période de négociation et d’exercice des BSA sur Euronext Paris est prévue du 22 avril 2015 au 31 juillet 2016. Mais le succès de cette opération sera jugé bien avant que les bons ne deviennent caducs.
La date clé, c’est le 5 mai. Si, à cette date, SMA-BTP n’a pas cédé ses bons de souscription, Tour Eiffel perdra le statut de transparence fiscale des SIIC. Concrètement, cela se traduira par un débours de 6 millions lié à la perte du statut, auquel il convient d’ajouter près de 5 millions d’euros d’impôts à payer pour la seule année 2014. Près de 11 millions d’euros de perte de valeur ! Cette somme serait irrécouvrable même dans l’hypothèse ou Tour Eiffel pourrait prétendre à retrouver l’éligibilité au statut SIIC après avoir cédé ses bons de souscription…
La première conséquence se ferait sentir sur la valeur d’actif net par action qui reviendrait de 58,20 euros à près de 56,40 euros, hypothéquant un peu plus le reclassement des bons de souscription de SMA BTP puisque, alors, le prix des nouvelles actions présenterait une prime sur leur valeur d’actif net réévalué. Et c’est donc bien le statut SIIC qui paraît compromis dans ce scénario.
Pour les actionnaires minoritaires d’une société foncière non dotée du statut SIIC, leur funeste sort serait d’assister à une forte baisse du cours de l’action qui pourrait revenir dans la zone des 45 euros. C’est à ces niveaux qu’elle avait glissé après le succès de l’OPA à 58 euros, jusqu’à ce que SMA-BTP fasse briller un dénouement heureux de maintien du statut SIIC, assorti d’un fort développement (doublement du patrimoine !). Toutefois, les actionnaires minoritaires de Tour Eiffel devraient ensuite bénéficier du constat que ne manquerait pas de faire SMA-BTP si la mutuelle devait constater la perte durable du statut SIIC : le maintien de la cotation en Bourse d’une foncière assujettie à l’impôt sur les sociétés est un non-sens économique. SMA-BTP n’aura pas vraiment d’autres choix que de retirer Tour Eiffel de la Bourse en lançant une nouvelle OPA suivie sans doute d’une offre de retrait. Une opération qui ne pourrait se faire en dessous de la valeur d’actif net réévalué. Soit 56,40 euros, dividende inclus. C’est le prix à payer pour que SMA-BTP puisse la convertir en OPCI pour retrouver la neutralité fiscale.
Dans le prospectus d’émission des bons de souscription, on apprend que « le groupe SMA recherche donc des investisseurs susceptibles d’acquérir et d’exercer les BSA devant lui être attribués dans le cadre de l’émission de BSA afin de respecter le seuil de 60% susvisé. Toutefois, à ce jour, il n’est pas en mesure d’assurer qu’il pourra respecter ce seuil au 5 mai 2015 au plus tard. La Société tiendra le marché informé des cessions de BSA qui seront réalisées par le groupe SMA, du nombre de BSA cédés et de leur prix de cession ainsi que des modalités spécifiques qui seraient le cas échéant convenues. »
Il reste à espérer que des cessions massives des bons de SMA BTP soient communiquées… très vite.
Pierrepapier.fr